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bre, riche de décoration comme de matière, coupée dans toute sa hauteur de deux contre-forts garnis d’une statue à chaque étage, présente plus d’une de ces incohérences, mais qui nuisent peu à l’effet général. A L’intérieur, la nef, d’un beau gothique italien, se rejoint à un chœur et à des transepts de la renaissance; mais ce mélange ne choque guère que les savans, quand les parties qui le composent sont belles par elles-mêmes et fondues avec un peu d’habileté. C’est le cas de l’église de Côme, toute terminée qu’elle est par une coupole de Juvara, dans le goût du XVIIIe siècle. Un artiste du XVIe est l’auteur des statues des deux Pline qu’on voit à l’entrée, et que les habitans de Côme ont érigées à leurs concitoyens. Les Italiens sont généralement fidèles à ces souvenirs de l’antiquité, et les allient volontiers à ceux du moyen âge. A la droite de l’église, on remarque un monument de cette dernière époque, le Broletto, hôtel de ville construit en assises alternées de marbre blanc et noir. A l’intérieur de l’église, c’est à la renaissance que vous ramènent les fresques et les tableaux de Luini. Il faut dès à présent accoutumer vos yeux à ce charmant type de vierge qu’il a sans cesse répété, et dont on peut voir au Louvre deux remarquables spécimens. Il me semble y retrouver des traces de ressemblance avec certaines têtes de Léonard de Vinci, et l’on pourrait conjecturer que le maître et l’élève auraient eu le même modèle, imité par le premier avec plus de liberté et d’imagination, reproduit par le second avec une exactitude qui n’a rien coûté à la grâce[1].

Si l’on s’arrêtait quelques jours à Côme, si l’on étudiait avec soin ses antiquités et ses monumens, ses tours et ses églises, ses inscriptions et ses peintures ; si l’on visitait les célèbres villa des bords du lac, la Pliniana, la Sommariva, la Belvédère, la Melzi, et tant d’autres; si l’on se gravait dans la mémoire ses sites délicieux, relevés par une végétation beaucoup plus méridionale que celle des contrées voisines, on connaîtrait en abrégé tous les genres de beauté de l’Italie. Rien de ce qu’on admirera dans le reste de la péninsule ne manque entièrement à Côme et à ses environs, et Virgile a eu raison de placer son lac, Lari maxume, dans l’énumération des magnifiques dons que sa patrie a reçus du ciel, lorsqu’il la met au-dessus des régions arrosées par le Gange et l’Hermus.


III.

La Brianza, qui touche au lac de Côme, est ce jardin de la Lombardie que traverse le chemin de fer en se dirigeant sur Monza, et

  1. Ajoutons cependant que la qualité d’élève de Léonard est contestée à Luini, mais je suis l’opinion commune.