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informer qu’il avait servi en France. En même temps commença la vexation, jusqu’alors inconnue, des passeports. La vénalité des agens du fisc et la minutie tracassière de la police sont les deux signes auxquels on reconnaît les gouvernemens de l’Italie du centre ou du midi. Ce n’est pas que j’aie aucune envie de médire de celui de Parme. Ce duché est aujourd’hui sous l’autorité d’une princesse française dont on n’a jamais parlé qu’avec un respectueux intérêt. La sanglante mort de son mari a laissé peu de regrets, et sa régence a rétabli un certain ordre dans l’administration. Il ne manque à son gouvernement qu’une chose, une réforme, cette réforme indispensable et si difficile aujourd’hui à tous les vieux pouvoirs.

Parme a tout à fait l’aspect de ce qu’on appelle en Allemagne une résidence. Une toute petite armée élégamment tenue et un joli palais remis à neuf à côté d’une jolie salle de spectacle, plus un jardin où ne va personne, dessiné à l’ancienne mode française, indiquent une de ces villes mondaines et ennuyeuses où il y a bonne compagnie et rien à faire. C’est pourtant la ville du Corrège, et ce nom suffit pour la recommander entre mille au voyageur qui a des yeux.

Ce voyageur donnera d’abord quelques momens à la Madonna della Steccata (Notre-Dame-de-la-Palissade), grande église du XVIe siècle, et qu’assurément les beaux-esprits de Parme, du temps que Condillac élevait l’héritier du prince dont le comte d’Argental était le ministre à Paris, devaient préférer à tous les autres monumens de la ville. Même les fresques du Parmesan ne nous ont point paru mériter l’éloge qu’en fait un juge cependant très compétent, sir Josuah Reynolds. Il faut voir seulement le tombeau d’Alexandre Farnèse, sarcophage très simple, avec son nom de baptême, son casque et son épée; mais ce nom tout court: Alexander, n’est pas une idée si simple.

La cathédrale et son baptistère sont, je crois, les plus beaux édifices religieux du XIIe siècle que j’aie rencontrés en Italie. Le baptistère, terminé en 1281, porte quelques traces des changemens qu’éprouva l’architecture pendant les cent années qu’on mit à le bâtir, et le haut de l’édifice n’est pas d’un style lombard aussi pur que le reste. C’est une tour octogone en marbre de Vérone bruni par le temps; chaque face, ourlée aux angles par un pilastre en fuseau, est divisée en cinq étages de galeries dont les quatre colonnettes, assez rapprochées, portent des arceaux semi-circulaires. Des sculptures assez rudes, fantastiques, grotesques même, ajoutent à l’air d’antiquité du monument. Il en est de même de l’intérieur. Au centre, une grande cuve de marbre indique qu’on y a pratiqué dans l’origine le baptême par immersion. C’est encore là que tous les enfans de