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plaisir, étudié avec profit, malgré les rapides progrès de la science. L’illustre Léopold de Buch, qui fut l’un des pères de la géologie moderne, visita plus d’une fois les diverses parties des Alpes. M. Elie de Beaumont aussi les a fréquemment parcourues, il a fait connaître ce qu’on pourrait appeler, la structure de ces chaînes compliquées, il y a découvert le secret et les lois des grandes révolutions qui ont fait surgir les montagnes à la surface de notre globe. Cependant, parmi les naturalistes éminens qui ont choisi les Alpes pour champ de leurs explorations, il en est un surtout qui doit en grande partie la popularité dont il jouit à ses patientes études sur les glaciers alpestres. M. Agassiz a visité en Suisse la plupart des grands cirques qui servent de réservoir aux neiges éternelles, il a gravi quelques-unes des cimes les plus élevées qui les dominent, entre autres la Jungfrau, dont il atteignit le premier le sommet, d’un accès beaucoup plus difficile que celui du Mont-Blanc lui-même. On aurait peine à trouver un théâtre aussi admirablement disposé que les Alpes pour étudier les lois de la formation et du mouvement des glaciers. Dans la zone polaire, on ne peut les visiter qu’en affrontant les rigueurs d’un climat meurtrier, au prix de mille dangers et de longues fatigues ; en Suisse, les glaciers débouchent dans de riantes vallées, et il suffit de quelques heures pour passer de l’hiver des hauteurs neigeuses dans l’air plus doux de la région des pâturages et des forêts.

Les travaux de M. Agassiz sur les glaciers auraient suffi à l’illustrer : ils ne sont pourtant qu’un de ses titres à la célébrité. Tandis que la vie entière d’un homme suffit à peine aujourd’hui pour approfondir quelques points particuliers des sciences zoologiques, il n’est dans cet ordre d’études aucun grand problème que les investigations de M. Agassiz n’aient touché. Il ne s’est pas contenté d’étudier les animaux aujourd’hui vivans ; il a écrit sur les animaux fossiles des ouvrages considérables, qui sont de véritables monumens scientifiques. De la comparaison entre la faune vivante et les faunes éteintes, il a su tirer des conclusions aussi neuves que profondes relativement à la succession des formes organiques sur la terre. Son activité intellectuelle a tout embrassé ; il s’est associé avec ardeur au mouvement de la zoologie moderne, qui poursuit la solution de problèmes tout nouveaux dans l’étude si longtemps négligée des animaux inférieurs et de l’embryogénie comparée. Il n’a abordé aucune question sans l’éclairer d’une vive lumière : ses travaux innombrables ont été publiés et traduits en Suisse, en Allemagne, en France, en Angleterre, en Amérique, répandus dans une foule de livres, de recueils, dans de nombreuses et actives.correspondances. Il ne peut entrer dans le plan de cette étude d’en donner une analyse