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législation des monnaies de l’ancien régime fut attaquée, quand enfin les langues furent déliées et les plumes affranchies, en 1789. Mirabeau se fit l’interprète éloquent du sentiment public au sein de l’assemblée constituante par un discours qui est un de ceux où il a été le mieux inspiré, et qui, par les développemens qu’il présente, forme un véritable traité sur la matière.

A partir de 1789, un changement complet s’opère dans l’esprit et la lettre de la législation française sur les monnaies. Le passé est traité avec un mépris qui, en cette matière, était parfaitement justifié. A la place de notions aussi dénuées de bon sens que contraires à l’équité la plus vulgaire apparaissent des idées saines, claires, précises, conformes à l’éternelle justice et aux traditions les plus sages des peuples de l’antiquité. Ces idées sont celles que les hommes les plus éminens de l’Europe reconnaissaient à la fin du XVIIIe siècle, celles auxquelles la plupart des gouvernemens depuis se sont ralliés avec un zèle dont on ne citerait pas un autre exemple. En France particulièrement, on s’est proposé, dans la législation nouvelle, d’empêcher et de prévenir le retour des abus si nombreux et si préjudiciables qui avaient caractérisé le système monétaire de l’ancien régime. Le législateur a été surtout préoccupé de la nécessité de substituer à une mobilité désastreuse dans l’unité monétaire une fixité absolue. Telle est la pensée dont nous allons retrouver constamment l’empreinte dans l’exposé que j’aborde enfin de la législation moderne de la France sur ce sujet.

Pour se rendre un compte fidèle du sens de cette législation, il suffirait à la rigueur de prendre le texte de la loi du 7 germinal an XI, qui a définitivement constitué notre système monétaire, et de le rapprocher de l’exposé des motifs qui explique avec une clarté parfaite ce que la contexture de la loi pourrait avoir de trop laconique au gré des personnes qui aiment la législation développée. Cependant il ne sera pas superflu de faire davantage. La loi du 7 germinal an XI a été fort longuement préparée. Plusieurs documens importans y ont servi : l’un est le rapport présenté par Gaudin, alors ministre des finances, aux consuls de la république, rapport qui fut envoyé au conseil d’état, et sur lequel, conformément à la constitution, ce corps procéda au travail de rédaction du texte de la loi. Le second est le rapport fait au conseil d’état même par M. Bérenger. Il y eut ensuite un deuxième travail de Gaudin et un deuxième rapport de M. Bérenger, bons à consulter l’un et l’autre; mais ce n’est pas tout : antérieurement au consulat, la question des monnaies avait occupé toutes les assemblées délibérantes qui s’étaient succédé pendant la révolution. Le franc, qui est la base du système, avait été déterminé par différentes lois dans sa nature et dans sa consis-