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sauf plus tard, lorsqu’elle aurait porté ses armées à l’effectif de guerre, à intervenir hautement comme médiatrice armée. Le second point était de profiter de l’occasion pour se faire restituer d’une manière ou d’une autre, par la France, les province perdues en 1809.

L’empereur Napoléon nourrissait de tout autres pensées. Il désirait élargir le cadre de l’alliance contractée avec l’Autriche en 1812, substituer à l’alliance restreinte une entente intime et cordiale, et la consacrer en obtenant qu’elle coopérât aux efforts de la campagne prochaine, non plus seulement avec 30,000 hommes prêtés et se battant à regret ou ne se battant pas du tout, mais avec 60,000 résolus et dévoués. Il ne pouvait se dissimuler qu’il n’obtiendrait une coopération aussi précieuse qu’au prix de grands sacrifices : il était tout disposé à les faire ; mais la prudence comme la dignité lui commandaient d’attendre, pour préciser la nature et l’étendue de ces sacrifices, que la cour de Vienne lui eût fait connaître si elle était décidée à resserrer les nœuds de son alliance avec lui. Procéder autrement, c’eût été lui livrer prématurément un secret dont elle n’eût pas manqué d’abuser plus tard pour nous rançonner davantage. Avec un cabinet aussi froid et aussi calculé que celui de Vienne, il fallait une réserve extrême et ne nous découvrir qu’au dernier moment.

À son passage à Dresde, le 15 novembre. Napoléon avait adressé à l’empereur d’Autriche une lettre autographe pour lui annoncer son retour en France, et lui demander que le contingent autrichien pût être porté de 30,000 à 60,000 hommes. Il l’avait prié également de lui envoyer un négociateur en l’absence du prince de Schwarzenberg, retenu à l’armée. De retour à Paris, il renouvela ses instances sous les formes les plus pressantes[1]. L’Autriche refusa de nous suivre dans la voie où nous nous efforcions de l’attirer ; elle répondit en nous offrant son intervention officieuse pour nous réconcilier avec nos ennemis. Jamais la parole de M. de Metternich n’avait été plus douce, plus pénétrante. Il protesta du désintéressement de sa cour. « Son unique préoccupation, dit-il au comte Otto, notre ambassadeur, était d’utiliser au profit de la paix sa fidélité à la politique française. La France devait être impatiente d’arriver à la paix, et l’Autriche était la seule puissance qui fût en mesure de lui en assurer le bienfait. L’empereur Napoléon pouvait-il espérer de trouver un défenseur plus dévoué, plus chaleureux de ses intérêts que l’empereur François ? Si la Russie et l’Angleterre étaient assez aveugles pour repousser ses propositions, alors l’Autriche n’hésiterait pas, et elle embrasserait hautement la cause de la France. »

Le 3 janvier 1813, M. de Metternich fut plus pressant encore. « Parlez-nous franchement, dit-il ; faites-nous connaître ce que vous

  1. Dépêches des 8, 12 et 16 décembre 1812 au comte Otto.