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l’Honneur et de la Vertu, dont il fit rafraîchir les peintures. C’était prendre bien de la peine pour un culte dont la mode était passée.

Vespasien, qui, dans sa vie privée, était d’une extrême parcimonie, n’épargnait rien quand il s’agissait des divertissemens ou des édifices publics. Il apporta un zèle extrême à rebâtir le Capitole. On le vit se mettre lui-même à l’ouvrage et placer des pierres sur son des comme un simple manœuvre. Quelques débris de muraille cachés dans le couvent des franciscains d’Ara-Cœli sont tout ce qui reste de ce temple fameux. Vespasien avait ses raisons pour le reconstruire. D’abord c’étaient ses ennemis, les partisans de Vitellius, qui l’avaient incendié lorsqu’ils y attaquaient son frère Sabinus, si indignement égorgé par eux, et puis il était important pour lui de rendre aux Romains le temple de Jupiter Capitolin, temple dont on regardait l’existence comme liée aux destinées de Rome, à tel point que lorsqu’il fut la proie des flammes, quelques-uns craignirent que ces destinées ne touchassent à leur terme. Il était habile, en réparant le palladium romain, de paraître lui donner un nouveau commencement associé aux commencemens de la nouvelle famille appelée à l’empire. C’est ainsi qu’on s’explique l’empressement de Vespasien à prendre part aux travaux de reconstruction, comme l’aurait pu faire un prince plus dévot que lui.. Vespasien ne se montrait religieux que parce qu’il était politique.

Comment un homme avant tout pratique comme il l’était eût-il négligé les travaux d’utilité publique? Aussi la Porte-Majeure nous montre-t-elle au-dessous de l’inscription de Claude une inscription de Vespasien. Elle nous apprend qu’il avait réparé à ses frais l’aqueduc de Claude. Loin de Rome, une autre inscription atteste que Vespasien, pour faire passer la voie Aurélienne, a taillé une montagne. L’inscription a bien la simplicité du caractère de son auteur et se termine par la formule ordinaire : faciendum curavit, comme s’il s’agissait de tout autre chemin.

Enfin Vespasien bâtit le temple de la Paix. Cet avare, qui autrefois avait tout osé jusqu’à extorquer à un jeune homme 40,000 fr. pour le faire nommer sénateur contre la volonté de son père, et qui, devenu empereur, vivait assez pauvrement, éleva un des plus magnifiques monumens de l’ancienne Rome, le temple de la Paix. Il y avait rassemblé un grand nombre d’objets précieux, et entre autres les vases d’or et le chandelier aux sept branches pris dans le temple de Jérusalem. La république, qui avait élevé des temples à tant de divinités et même à la Fièvre, n’en avait point consacré à la Paix, car la guerre était l’état permanent et nécessaire du peuple romain. Auguste ferma le temple de Janus, mais il fallut bientôt le rouvrir. J’ai montré plus haut ce qu’était la paix de l’empire romain quand