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dernière presque systématiquement exclus des hautes positions militaires, des commandemens supérieurs, mais occupant en compensation et sans partage, dans les états-majors, le commissariat, la diplomatie, des fonctions grassement rétribuées qui doublent et au-delà leur paie régimentale; — près de l’armée native, le service civil magnifiquement rétribué, avec des privilèges de rang exorbitans, tels qu’un jeune homme presque au sortir du collège prend le pas sur un officier qui, après de longs services, a atteint, à la loi commune de l’ancienneté, le rang de capitaine; — au-dessous du service spécial, une armée de fonctionnaires mal payés, peu considérés, et qu’une loi exclusive enferme dans un cercle de positions hiérarchiques plus que médiocres; — aux chefs-lieux des présidences, le pouvoir indépendant de toute autorité locale, des juges des cours suprêmes nommés par la reine; — enfin, dans la métropole, les pouvoirs rivaux de la cour des directeurs et du Board of control: l’un, fidèle représentant d’une assemblée d’actionnaires, qui, comme tel, ne voit guère plus loin que le solde de balance des recettes et des dépenses, et fait passer bien avant les intérêts de la politique les intérêts du prochain dividende; l’autre, avec des instincts d’autant plus guerriers qu’il n’a jamais eu à payer la carte des conquêtes, se laissant aller quelquefois, dans des momens de vertige, à des entreprises insensées, la guerre de Caboul par exemple, nous devrions peut-être ajouter la guerre qui commence aujourd’hui contre la Perse!

Et cependant, admirable résultat du bon sens pratique, du véritable patriotisme de la nation anglaise, de ces rouages divergens, de ces élémens de discorde et de dissolution est sorti un des plus grands faits des temps modernes : une série de victoires et de conquêtes telle que, pour retrouver la pareille, il faut aller chercher à l’apogée de leur gloire dans la vie des Alexandre, des César et des Napoléon. L’histoire financière de la compagnie des Indes n’est sans doute pas aussi brillante que son histoire militaire : un déficit dans les finances publiques est souvent la conséquence des plus belles campagnes de son armée; mais qui peut aujourd’hui, en présence des faits acquis, soutenir avec quelque apparence de raison que les résultats n’ont pas répondu aux sacrifices? Quelques guerres funestes et inutiles, telles que la guerre contre les Birmans en 1825-26, la guerre de l’Afghanistan en 1839, l’annexion du Scinde à des jours plus récens, ont sans doute grevé d’une dette considérable le trésor de l’Inde. Néanmoins à ce revers de la médaille on peut opposer victorieusement le tableau d’entreprises militaires suivies d’un riche accroissement de revenu. Depuis les premières années du siècle, si à des jours d’épreuves un déficit inquiétant s’est présenté entre les recettes et les dépenses du gouvernement de l’Inde, le revenu public n’a pas cessé de suivre