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l’indigo, le coton, les graines oléagineuses poussent presque sans labeur sur ce sol privilégié, et pour certains produits travaillés, les châles du Cachemire, les mousselines de Dacca, l’industrie indienne est arrivée à une perfection que l’industrie européenne, avec sa science et ses puissans moyens, n’égale pas. L’intérieur des domaines de la compagnie renferme les villes d’ancienne origine de Dacca, Lucknow, Bénarès, Agra, Dehli, Lahore, qui prennent rang parmi les cités les plus peuplées du monde. Enfin, aux bords de la mer, aux lieux qui sont les points de contact entre l’Inde et l’Europe, se sont élevées comme par enchantement les capitales de Bombay, Madras et Calcutta, dont la fondation remonte à peine à un siècle, et qui, sous l’influence vivifiante des transactions commerciales, ont déjà acquis des proportions colossales et comptent, la première 230,000 âmes, la seconde 700,000, et la troisième 800,000.

La taxe foncière donne plus de la moitié du revenu de l’Inde, et en effet, même dans les divisions territoriales où il y a le plus de villes, dans les provinces nord-ouest par exemple, la population agricole est en grande majorité. Ainsi le recensement fait dans cette sous-présidence en 1848 donnait pour cette dernière le chiffre de 14,724,233 individus, tandis que la population réunie des villes s’élevait seulement à 8,475,435 âmes, proportion qui, dans toute autre partie de l’empire anglo-indien, serait encore plus favorable à la population des champs. La taxe foncière a toujours été dans l’Inde, même sous les rois indigènes, beaucoup plus pesante que dans les autres contrées asiatiques, la Turquie et la Perse par exemple, où l’impôt varie du dixième au cinquième du revenu de la terre. La loi hindoue fixe l’impôt territorial au sixième du revenu brut du sol, sans y comprendre la part affectée à l’établissement religieux, part qui, au temps de la toute-puissance des brahmes, devait être considérable, ainsi que diverses charges municipales. Quelque lourdes cependant que fussent ces dispositions de la loi écrite, les exactions pratiquées par tous les agens de l’autorité étaient bien plus lourdes encore. Aujourd’hui, dans le domaine indien de l’Angleterre, la taxe territoriale varie du huitième au quart du revenu brut.

Le mécanisme de l’impôt n’est point uniforme, et varie selon les diverses parties de l’empire. En effet, lorsque la compagnie des Indes, comme fondée de pouvoirs de la couronne, obtint, par droit de conquête et de cession, d’être substituée aux chefs natifs, elle disposa des territoires acquis, non pas conformément aux prescriptions d’une loi stable, mais suivant les circonstances et les besoins du moment. On peut classer en trois catégories, auxquelles les autres se rattachent, les divers systèmes de taxation qui ont été suivis : le système des zemindars ou grands propriétaires, appliqué dans le Ben-