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navire jointe à l’intérêt des valeurs transportées pendant le nombre des jours qui se trouveraient ainsi gagnés. Même à frais égaux, les navires ne suivraient sans doute point le canal à cause des ennuis de ce mode de navigation, par crainte de délais inattendus, d’accidens dus à la négligence ou simplement au hasard. Il faut donc qu’outre l’économie de temps une véritable économie d’argent les attire dans la voie nouvelle. La fixation des tarifs devient en quelque sorte une question vitale pour l’avenir de l’entreprise : voici de quelle manière on peut arriver à la résoudre. La dépense d’un navire comprend l’intérêt du prix d’achat et du gréement, les salaires et la nourriture de l’équipage, et les frais d’assurance. Pour un vaisseau de 1,300 tonnes, on peut évaluer cette dépense à 6,500 francs par mois ou 216 francs par jour. Dans un navire de ce tonnage, la valeur d’une cargaison ordinaire ou moyenne peut être estimée à 300,000 francs; l’intérêt de cette somme à 6 pour 100 est de 1,500 francs par mois, ou de 50 francs par jour. En ajoutant ces deux sommes, on voit que chaque jour de traversée représente une dépense totale de 266 francs. Si le vaisseau traversait un canal maritime, il faut examiner à combien de jours de traversée équivaudrait ce passage au point de vue des frais. Un navire de 1,300 tonnes aurait à payer, au prix de 3 dollars ou 15 francs environ par tonne, la somme de 19,500 francs, au prix de 2 dollars ou 10 fr. La tonne celle de 13,000 fr., au prix de 1 dollar 1/2 ou 7 francs 50 cent, la tonne celle de 11,250 fr. La première de ces trois sommes représente la dépense de 65 jours de traversée, la seconde de 43 jours, la troisième de 37 jours. En adoptant le premier de ces tarifs, on laisserait donc en dehors du mouvement commercial de l’isthme tous les navires qui, en le traversant, ne gagneraient qu’un nombre de jours inférieur à 65; en se tenant au second tarif, on perdrait encore tous ceux pour lesquels le passage par l’isthme ne permettrait pas de faire une économie de temps égale à 43 jours. Ainsi que nous le verrons, il est de toute nécessité d’adopter le second ou le troisième tarif, et il est vraisemblable qu’il serait utile d’admettre le dernier pour présenter un avantage sensible au commerce et attirer tout le trafic qui pourrait suivre la voie de l’Amérique centrale.

Le taux des tarifs est en relation directe avec l’importance du tonnage qui serait attiré par l’ouverture d’un canal maritime dans l’Amérique centrale. Une fois admis le tarif le plus convenable, il faut chercher à évaluer sur quel tonnage et par conséquent sur quel revenu l’on peut compter, en second lieu si ce revenu est assez considérable pour rémunérer suffisamment les capitaux qu’il est nécessaire d’engager dans l’entreprise. Il est bien difficile de résoudre