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canal de San-Juan de Nicaragua à San-Juan-del-Sur, qui est aujourd’hui le port du Pacifique choisi par la Compagnie de transit, coûterait de 100 à 125 millions, et cette somme serait portée à. 200 millions par l’accumulation des intérêts pendant les années qui seraient employées à achever une telle entreprise. Un canal aboutissant à Realejo coûterait encore plus. Les dépenses de celui qui se terminerait à Brito sur le Pacifique ont été évaluées avec beaucoup de soin et en grand détail dans le rapport intéressant du colonel Childs. Les chiffres de l’ingénieur américain nous fourniront la base la plus solide pour comparer le revenu probable du canal, tel que nous l’avons estimé, à celui qu’il serait nécessaire d’atteindre pour que l’entreprise fût suffisamment rémunérée. Suivant le colonel Childs, les travaux nécessaires pour construire un canal de 17 pieds de profondeur absorberaient une somme de 157 millions; mais pour donner au canal, comme il serait nécessaire de le faire aux termes mêmes de la concession accordée par l’état de Nicaragua, la profondeur de 20 pieds, il faudrait dépenser en plus 27 millions. Il faut ajouter à cette somme de 184 millions l’intérêt des capitaux pendant les années écoulées entre le commencement des travaux et l’ouverture du canal. Il est presque impossible que ce terme ne dépasse point huit années à cause de l’extrême rareté de la main-d’œuvre et des difficultés de toute sorte qui ne peuvent manquer de retarder les progrès d’une entreprise aussi ardue. En supposant, pour exagérer les chances favorables, que huit années seulement soient nécessaires, les intérêts, comptés à 7 pour 100 (et c’est le taux ordinaire auquel les chemins de fer, aux États-Unis, contractent leurs emprunts), s’élèveraient à 51,520,000 fr. On ne peut compter moins de 3 millions, pour les premiers frais, achat de matériel, bateaux dragueurs, etc.. En y ajoutant les sommes à payer à l’état de Nicaragua pour la concession et pendant l’exécution des travaux, on arrive à une dépense totale de 240 millions.

Les charges annuelles de la compagnie se composeront de l’intérêt à 7 pour 100 de cette somme, soit 16,800,000 francs, plus les frais d’entretien et d’exploitation, qu’on évalue à 1,250,000 francs, auxquels il faut ajouter 50,000 francs à payer au gouvernement de Nicaragua, et 50,000 francs pour l’amortissement du capital dans quatre-vingt-cinq ans, période à laquelle est limitée cette concession. Ces sommes réunies s’élèvent un peu au-delà de 18 millions. Comme le revenu probable ne monte qu’à la somme de 11,440,000 francs, on voit que la construction d’un canal maritime dans l’état de Nicaragua serait une ruineuse spéculation. On peut en dire autant du canal projeté dans l’isthme de Darien : aux termes mêmes du rapport de M. Lionel Gisborne, les travaux du