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tête des affaires. M. de Cavour a eu à traverser des épreuves difficiles, il les a surmontées avec habileté. Doué d’un esprit fort libéral, il n’ignore pas qu’après tout le libéralisme ne saurait dépasser certaines limites, et que la meilleure politique pour le Piémont est celle qui maintient dans leur intégrité toutes les garanties conservatrices. Le Piémont, on s’en souvient, avait avec l’Autriche une difficulté particulière bien ancienne, celle qui était née du séquestre mis sur les biens des émigrés lombards. L’Autriche a levé le séquestre, et la difficulté diplomatique disparaît. Les rapports n’ont pas été renoués encore entre les deux gouvernemens, mais ils le seront inévitablement, et s’il n’y a pas plus d’amitié entre le Piémont et l’Autriche, il y aura du moins des relations régulières.

De quelque côté qu’on tourne son regard en Europe, n’aperçoit-on pas quelques symptômes de ce travail politique qui agite tous les pays et qui se manifeste sous les formes les plus diverses ? La situation respective du gouvernement et du parlement n’a point changé en Hollande depuis les débats assez orageux du budget. La lutte est naturellement suspendue par l’ajournement des chambres, elle n’est point finie ; il est facile de voir au contraire que les partis n’ont nullement abdiqué leurs ressentimens, et qu’ils attendent l’heure où la session législative recommencera. On a pu croire un instant que le cabinet, cherchant à surmonter les difficultés qui l’entourent, songeait à dissoudre la seconde chambre et à faire appel aux électeurs. Une résolution de ce genre eût été peut-être du goût des passions extrêmes. Plus circonspect et mieux inspiré, le ministère n’en a rien fait ; il a vu, il a dû voir qu’une élection en ce moment pourrait accroître la force de l’opposition au lieu de la diminuer, et que les complications se trouveraient ainsi aggravées. Au fond, l’opposition garde son attitude d’expectative, toujours assez menaçante, et le cabinet reste tel qu’il était. Le ministre de l’intérieur, M. Simons, qui avait été pris tout à coup de maladie à la suite des dernières discussions, est aujourd’hui rétabli, et dans la retraite de Loo, que le roi lui a ménagée avec bienveillance, il s’est occupé de l’élaboration de la loi sur l’instruction primaire. M. Simons paraît avoir terminé son travail, qui a été soumis au conseil des ministres, et qui doit subir encore l’examen du conseil d’état avant d’être présenté aux chambres. C’est dans la discussion de ce projet sans doute que se réveilleront les luttes entre le cabinet actuel et l’opposition parlementaire. Ces luttes politiques ne sont pas tout cependant : la Hollande vient de perdre plusieurs hommes distingués ; l’un d’eux est le baron de Fagel, bien connu dans la diplomatie pour la droiture et la bienveillance de son caractère. Ce digne vieillard, qui était plus qu’octogénaire, avait débuté autrefois dans la vie militaire et s’était associé à toutes les vicissitudes de la maison d’Orange avec une fidélité héréditaire dans sa famille. Il lui était arrivé un jour de combat, en Allemagne, de sauver la vie du prince d’Orange, devenu plus tard Guillaume Ier. En 1814, il fut nommé ministre des Pays-Bas à Paris, et pendant quarante ans consécutifs il mit tout son zèle à cultiver les relations amicales entre les deux pays à travers toutes les révolutions, M. de Fagel était un de ces hommes qui savent faire marcher ensemble le dévouement le plus entier à, leur souverain et les principes d’une sage liberté. La Hollande a fait aussi récemment une autre perte, celle de M. le baron Melvill van Carnbee, officier de marine d’un mérite supérieur, et qui