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convention qui assurait à ses troupes le libre passage de la Galicie et de la Bohême, mais sous la condition que leurs armes seraient transportées sur des chariots. Le prince insista avec tant de force pour qu’elles fussent dispensées d’une obligation aussi humiliante, que le général Frimont céda enfin à ce cri de l’honneur militaire : il fit rendre les armes au corps polonais et aux Saxons, et consentit à ce que leurs journées d’étape fussent doublées. À la demande de la Saxe, l’empereur d’Autriche autorisa les troupes polonaises et saxonnes à se diriger sur Zittau. Plus tard, Napoléon obtint que la ligne fût reportée à cinquante lieues plus bas, sur Schweidnitz.

Lorsque l’empereur eut rejoint ses corps d’armée, il jugea que la première opération à accomplir était d’effectuer sa jonction avec le vice-roi. Il ignorait complètement les intentions de l’ennemi ; il savait seulement que Wittgenstein et York manœuvraient sur la rive droite de la Saale, que Blücher était à Altenbourg, Miloradovitch à Chemnitz, que tous ces généraux étaient en mesure de se réunir et d’agir en masses, et il leur supposait naturellement le dessein de se jeter entre les armées de l’Elbe et du Mein, de les attaquer et de les écraser successivement. Toute sa crainte était d’être assailli au milieu de ses mouvemens de concentration vers les rives de la Saale, et il prit des précautions infinies pour éviter une surprise. Il combina la marche de ses corps de telle manière que, sans se gêner dans le déploiement de leurs colonnes, ils fussent constamment en communication les uns avec les autres et en mesure de se soutenir mutuellement dans le cas où ils auraient été attaqués isolément par des forces supérieures. Voici quelle était le 19 avril la position des deux armées de l’Elbe et du Mein : le vice-roi avait sa gauche sur l’Elbe, à l’embouchure de la Saale, occupant Bernbourg, sa droite sur le Hartz, sa réserve à Magdebourg. Le maréchal Ney, qui ouvrait la marche de l’armée du Mein, se portait d’Erfurt sur Naumbourg ; Bertrand et Oudinot s’avançaient sur Saalfeld ; Marmont avait déjà dépassé Gotha, et le duc d’Istrie avec la garde se dirigeait d’Eisenach sur Weimar. Le mouvement général continua les jours suivans avec le même ordre, le même ensemble et les mêmes précautions. Tandis que l’armée du Mein descendait la rive gauche de la Saale et allait au-devant du vice-roi, l’armée de l’Elbe la remontait de son côté. Sachant que l’empereur s’approchait, elle avait redoublé d’ardeur ; chacun de ses pas était marqué par un succès. Le 11e corps, composé tout entier de soldats aguerris, qui depuis deux mois avait été successivement commandé par le maréchal Gouvion Saint-Cyr et par le général Grenier, venait d’être définitivement placé sous les ordres de Macdonald. Ce maréchal, après avoir délogé les Prussiens de Querfurt, s’était porté sur Halle : les troupes ennemies qui occupaient cette ville étaient ces mêmes soldats