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deux dépêches furent expédiées de Dresde le même jour ; 5 août. L’une, officielle ; destinée à masquer la démarche qui allait être tentée, rappelait qu’avant de signer la convention du 30 juin, il avait été expressément convenu à Dresde que le médiateur ne se présenterait point comme arbitre, mais comme conciliateur ; elle renfermait en outre des insinuations très amènes contre la Russie, qu’elle accusait de n’avoir voulu ouvrir des négociations qu’afin de compromettre l’Autriche et d’étendre les malheurs de la guerre. La France proposait de n’exclure ni l’un ni l’autre des modes de négociation, et de traiter alternativement, soit par notes remises en séance, soit par explications verbales qui seraient ou ne seraient pas insérées au protocole, selon la demande des plénipotentiaires.

L’autre dépêche, très confidentielle, était adressée au duc de licence par le duc de Bassano, mais dictée tout entière par l’empereur Napoléon… « L’empereur vous ordonne, par une voie extra-ministérielle, de faire la présente démarche, ignorée du comte de Narbonne. Cette démarche a pour objet de savoir de quelle manière l’Autriche entend que la paix peut se faire, et si, l’empereur adhérant à ses propositions, l’Autriche ferait cause commune avec nous, ou si elle resterait neutre. Il n’est pas ici question de négociations, mais d’une ouverture toute de confiance, déterminée par des sentimens si évidens, que ce serait renoncer au but auquel l’Autriche dit vouloir atteindre que de n’y pas répondre sans réserve. Cette démarche restera toujours secrète, et aussitôt que l’empereur Napoléon sera certain du mot de l’Autriche, il donnera des instructions en conséquence à ses plénipotentiaires. La simplicité de cette démarche porte avec elle le cachet de l’homme qui la fait faire, et de toute sa fermeté. M. de Metternich doit donc penser qu’il faut se mettre à la dernière limite, et ne rien proposer qui soit déshonorant pour l’empereur Napoléon. M. de Metternich aura sans doute besoin de vingt-quatre heures ; on désire donner ces vingt-quatre heures, et écrire les conditions sous sa dictée. Dans trois jours, notre réponse sera donnée, et par là tous les embarras du congrès et toutes les difficultés qui l’assiègent seront dissipés. L’empereur Napoléon se trouve dans un état de guerre plus brillant qu’il ne pourra jamais l’être ; mais, comme il n’est pas inconséquent dans sa politique, avant de bouleverser son alliance avec l’Autriche et de détruire un système que les deux puissances avaient regardé comme devant fonder un jour leur sécurité commune, qu’elles aimaient à appuyer sur des sentimens personnels, il veut savoir la question, et en bien peser les avantages et les inconvéniens. Avant de faire cette ouverture, vous demanderez à M. de Metternich que ce que vous allez dire ne soit redit qu’à l’empereur d’Autriche, et ne soit transmis à