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matérielle, et il n’y a d’autre but que de reproduire les effets de la lumière et des ombres. Il s’est même trouvé des hommes de talent qui, dédaignant les sublimités morales, se montrent indifférens dans le choix des sujets pour se condamner exclusivement à la tâche plus ingrate qu’utile de poursuivre la réalité partout où elle est accessible, quelles que soient d’ailleurs les conditions de laideurs ou de beauté qu’elle affecte. On les voit même traiter de préférence les vues les moins pittoresques ou les figures les plus désastreuses, et les peindre par leurs plus mauvais côtés, afin qu’il soit bien entendu qu’ils ne veulent que copier servilement, et ils se montrent satisfaits quand ils croient avoir réussi. J’ai l’espoir que ceux qui visent ainsi à une reproduction exacte verront sans déplaisir qu’un physicien leur dise : « Vous observez les jeux de la lumière, et je les étudie comme vous ; vous le faites avec vos yeux, dont le témoignage vous égare quelquefois ; moi, j’utilise des instrumens précis qui ne peuvent faillir ; ces instrumens peuvent vous être utiles, je vais vous les prêter ; les connaissances accumulées dans la science, je vais vous les communiquer, et j’ai la confiance que la pratique de votre art y gagnera quelque chose, et que vous pourrez approcher davantage de la perfection que vous poursuivez. »

Avant d’analyser les apparences que nous offrent les objets extérieurs, il est nécessaire de nous rendre un compte exact du mouvement de la lumière qui nous les rend visibles, et pour réduire cette question à ses principes les plus simples, il faut suivre par la pensée un des rayons lumineux que nous envoie le soleil. Il part de la surface de cet astre, traverse en ligne droite et en 8 minutes 13 secondes l’espace de 40 millions de lieues qui sépare la terre du soleil, et parvient aux limites de l’atmosphère ; il s’y engage en changeant un peu sa direction et prenant une vitesse un peu moindre, et il continue de se mouvoir jusqu’au moment où il rencontre un point de la surface d’un objet. Alors une action spéciale se produit : arrêté subitement dans sa marche, le rayon se divise en une infinité de faisceaux moins intenses qui rebondissent sur l’objet interposé, et sont renvoyés dans toutes les directions. Cette décomposition du rayon primitif est la diffusion. Tout corps éclairé directement par le soleil, acquiert dès lors la propriété d’envoyer de la lumière vers tous les points de l’espace, et il devient visible comme s’il était lumineux par lui-même ; mais cette propriété, il la doit aux rayons qu’il a reçus, et quand ceux-ci viennent à lui manquer, il perd la faculté d’éclairer aussi aisément et aussi promptement qu’il l’avait acquise.

Dès-lors, aussitôt que les rayons solaires viendront rencontrer les divers objets disséminés au milieu d’un paysage, ils seront diffusés par toutes les surfaces qu’ils auront frappées, et chaque point de ces