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nelle complète, que rien ne nécessite dans l’état de la Péninsule, et qui serait la contradiction de tous les antécédens des membres les plus important du ministère. En définitive, ce qui paraît le plus clair en tout cela, c’est que les règlemens intérieurs des chambres seront modifiés de façon à empêcher des discussions oiseuses et des interpellations trop fréquentes. Il est possible aussi que l’élément de la grandesse soit fortifié dans le sénat, ce qui n’a certes rien de contraire à la liberté vraie. Ces modifications, dans tous les cas, ne seront faites qu’avec le concours des chambres : là est l’essentiel. En procédant ainsi, le général Narvaez compte sans doute offrir une satisfaction aux partisans d’une réforme tout en maintenant dans leur intégrité le principe et les garanties du régime constitutionnel. S’il réussit, il aura eu le mérite une fois de plus de rallier toutes les fractions du parti conservateur sur un terrain commun, dans une œuvre commune. Cette union des forces modérées est aujourd’hui la première condition de l’affermissement d’un régime régulier au-delà des Pyrénées.

Les grandes questions ne sont point certainement absentes dans l’histoire contemporaine du Nouveau-Monde, mais elles disparaissent tellement dans les petites convulsions, dans les mille péripéties de conflits obscurs, qu’elles semblent ne plus exister ; elles ne se font jour qu’entre deux révolutions, entre deux éruptions d’anarchie. Pendant quelque temps, on n’a vu dans les affaires de l’Amérique centrale que la querelle survenue tout à coup entre les États-Unis et l’Angleterre. Cette querelle s’est apaisée comme tant d’autres, des traités ont été signés, l’Angleterre vient de renouer ses rapports diplomatiques avec les États-Unis par la nomination d’un nouveau ministre à Washington, et la pauvre Amérique centrale reste avec son désordre, ses guerres civiles, surtout avec cette domination étrange qui est allée s’établir au cœur du pays, il y a bientôt deux ans. Depuis deux ans, il n’y a point d’autre question que celle de savoir comment se dénouera cette bizarre aventure de William Walker. Au demeurant, en plein XIXe siècle, à la lumière de la civilisation moderne, c’est une de ces invasions de bandits comme on n’en vit jamais au temps de la découverte de l’Amérique. Voici en effet quelques hommes qui, sans motif, sans mandat, poussés par leur seule audace, tombent sur un petit état, et lui font subir tous les outrages de la conquête sans être des conquérans. Walker, on s’en souvient, se glissait dans le Nicaragua comme auxiliaire de l’un des partis intérieurs ; bientôt il levait le masque, il procédait à un simulacre d’élection populaire qui lui décernait la présidence et il restait seul avec ses compagnons d’aventures au milieu du pays, dominant par la force, abandonné des quelques nationaux auxquels il avait d’abord fait illusion. C’est alors que la résistance a commencé. Costa-Rica a déclaré la guerre aux flibustiers campés au milieu de l’Amérique. Les autres états, Guatemala, Salvador, n’ont point tardé à joindre leurs armes à celles de Costa-Rica. Dans le Nicaragua même, des insurrections se sont organisées, et si cette situation se prolonge encore, cela ne s’explique que par les difficultés qu’éprouvent ces petits états à combiner leurs mouvemens, à faire agir leurs forces avec ensemble pour frapper un coup décisif sur l’ennemi. Dans cette lutte où des armées de cinq cents hommes sont occupées à se poursuivre, Walker n’a évidemment montré aucune espèce de talent supérieur, il n’a