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engendrées par les refroidissemens. Une préparation de caoutchouc rendrait facilement imperméable le petit collet qui recouvre les épaules. La criméenne remplacerait avantageusement la couverture que le soldat porte sur son sac et qui y fait une figure si disgracieuse. Cette couverture, si mal aisée à placer sur le sac, sèche très difficilement quand elle est mouillée et devient alors d’un poids écrasant. Non mouillée, elle pèse déjà 2 kilog. 650 grammes. Aussi, en été, pour ne pas trop charger les épaules du soldat ne lui donne-t-on qu’une demi-couverture ; l’autre moitié lui est remise à l’approche de l’hiver. L’emmagasinage de ces demi-couvertures est très difficile, et l’armée risque d’en être privée si les magasins ne peuvent la suivre. La criméenne n’a pas ces inconvéniens ; elle est moins lourde, on pourrait même en réduire encore le poids. Le sac serait déchargé de la différence.

Le goût français, qui se trompe quelquefois, a souvent dénaturé ce vêtement. Pour le plaisir de le rendre plus élégant, les officiers l’ont porté moins long, moins ample, sans collet ou sans capuchon. Ce n’était plus la criméenne ; elle perdait ainsi son caractère particulier, et perdait aussi ses qualités utiles. La seule modification qui paraîtrait convenable serait d’y mettre une patte en arrière, comme à nos anciennes capotes de fantassin, afin de lui donner à volonté plus ou moins de largeur, sans lui retirer ces grands plis tombans qui drapent noblement nos braves soldats et les rendent presque majestueux. La criméenne composerait avec la tunique l’habillement d’hiver. La tunique me paraît étriquée, serrant la taille d’une façon prétentieuse. L’ampleur de l’uniforme est à la fois plus hygiénique et plus militaire ; le costume des zouaves en est un exemple.

Les Russes, officiers et soldats, portent une capote grise, d’un tissu assez grossier, mais chaud et résistant bien à la pluie, qui descend jusqu’au bas de la jambe. Des rubans à coulisse, qui permettent d’en diminuer l’ampleur à volonté, la font froncer dans le dos, et ce froncement ne lui donne pas une grâce extrême. J’aime mieux la patte que nous avions, et qu’ont encore les Autrichiens. La capote de l’officier et même du général ne diffère de celle du simple soldat que par un petit galon étroit placé sur l’épaule. Le galon du général est orné de deux ou trois étoiles, selon le grade. Les Anglais n’ont pas pris la criméenne, ils nous ont emprunté la tunique, et ont adopté comme pardessus un long spencer de tricot brun, protégeant efficacement la poitrine et les reins, laissant aux mouvemens une parfaite liberté. La liberté des mouvemens est un grand avantage, mais qui ne compensait pas les qualités de la criméenne. Nos alliés y ont suppléé par diverses pièces d’habillement. Au lieu du capuchon, ils portaient une casquette de loutre rabattue