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été cruellement éprouvé, il y a deux ans, par la mort des deux reines, l’empereur d’Autriche ne s’était point cru tenu à ces déférences que les souverains observent d’habitude entre eux. Que prouve tout cela au fond ? C’est que si le Piémont n’aime pas l’Autriche, l’Autriche n’aime pas le Piémont, et le supporte impatiemment en Italie. C’est de tradition, et M. de Cavour ne fait que tenir aujourd’hui le langage tenu avant lui par ses prédécesseurs, par M. della Margherita lui-même. L’Autriche a voulu saisir l’occasion de la présence de l’empereur à Milan pour faire une manifestation diplomatique qu’elle peut juger utile à son ascendant en Italie ; elle n’ira pas plus loin sans doute, parce qu’elle ne serait appuyée ni par la France ni par l’Angleterre, et moins encore peut-être par la Russie. Pour le Piémont, il peut voir le plus clairement du monde que sa vraie force est dans la modération ; le gouvernement du roi de Sardaigne ne l’ignore pas, les partis l’oublient souvent à Turin. Ils croient être très libéraux et servir très efficacement l’indépendance italienne par des excès de parole et des manifestations d’une opportunité douteuse ; ils n’arrivent qu’à créer des embarras, ils font de la politique un système de taquineries qui après tout peut bien finir par fatiguer un grand gouvernement, ils entretiennent une agitation factice, dangereuse pour le cabinet de Turin lui-même, entraîné parfois au-delà des limites qu’il s’imposerait volontiers, et réduit aussi à répondre d’actes plus capricieux que réfléchis alors qu’il ne peut défendre réellement les intérêts italiens, dont il est l’organe, que par une ferme modération, et les intérêts libéraux, qu’il représente, que par le plus prudent esprit de conservation.

Telle est la situation de l’Italie que les mêmes problèmes s’agitent dans tous les pays italiens. Partout la lutte existe entre une politique de résistance outrée et des idées plus modérées, plus libérales, et elle se poursuit avec des chances diverses que la révolution épie pour se faire jour. Il y a un petit état où un esprit de sage réforme semble pénétrer dans les conseils du gouvernement et amène une sorte de pacification, un affranchissement graduel : c’est le duché de Parme. Le mouvement n’est pas sans doute très prononcé et n’est point sans restrictions ; pourtant il se décèle par certains actes et par certains faits. D’abord l’occupation autrichienne a cessé, les troupes impériales ont quitté Parme au commencement de ce mois. En outre il s’agite une question assez grave pour le duché, quoique simplement commerciale en apparence ; c’est celle de l’union douanière de Parme avec l’Autriche. Le traité qui consacre cette union est sur le point d’expirer ; il s’agit de savoir si la ligue douanière sera abandonnée, ou si elle sera renouvelée. Elle a été dénoncée il y a déjà quelques mois. L’Autriche, on le comprend, tient au renouvellement de son traité, non-seulement parce qu’il favorise son industrie manufacturière et ses finances, mais encore parce que cette union a une portée politique. Les intérêts parmesans au contraire se plaignent d’une combinaison qui les sacrifie à l’industrie autrichienne, qui a été ruineuse pour les finances du duché, et il faut bien qu’il en soit ainsi, puisque l’Autriche offre d’élever le chiffre des compensations pécuniaires qu’elle devait aux états qui faisaient partie de l’union. De plus, les raisons politiques qui déterminent le cabinet de Vienne doivent nécessairement avoir beaucoup moins de prix à Parme. Le gouvernement du duché a donc toute sorte de motifs pour résister, et il résiste jusqu’ici. Le voyage que M. de Buol vient de faire à Parme