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une espèce d’assaut du teutonisme contre le petit royaume du Nord. Les polémiques les plus passionnées et les subtilités les plus captieuses de la diplomatie ne peuvent détruire un seul fait, c’est que le roi de Danemark défend strictement son droit d’indépendance en refusant de laisser déférer à la juridiction d’un pouvoir étranger l’organisation constitutionnelle de la monarchie. La meilleure preuve que ce droit est réel, c’est que pendant cinq ans, à dater des communications diplomatiques de 1851, les cabinets allemands n’ont élevé aucune protestation. Le roi de Danemark a donné successivement des constitutions provinciales aux duchés ; il a promulgué la constitution commune, et aucune réclamation ne s’est produite. Ce n’est que dans un temps récent que l’Autriche et la Prusse, sollicitées par l’opposition aristocratique du Holstein, ont songé à réveiller cette querelle. Le cabinet de Copenhague fait un raisonnement bien simple : en prétendant intervenir pour régler de nouveau la situation des duchés, la Prusse et l’Autriche interviennent en réalité subrepticement dans les affaires du Danemark tout entier. Or il est des puissances qui ont reconnu et garanti par des traités l’intégrité et l’indépendance de la monarchie danoise. Si l’Autriche et la Prusse interviennent de leur côté, il est donc naturel que le cabinet de Copenhague s’adresse aux autres puissances, dont la garantie est inscrite dans des stipulations diplomatiques. C’est ce qu’il a fait réellement, et c’est ce qu’il fait encore. Les cabinets de Vienne et de Berlin ne peuvent rester les maîtres de restreindre aux proportions d’une affaire purement fédérale une question qui, par elle-même, prend une importance européenne. La Prusse et l’Autriche se raidissent, il est vrai, contre les conséquences logiques de leur abusive intervention ; mais il est évident que le jour où elles porteraient la question à Francfort, la confédération germanique se trouverait en présence des autres puissances européennes, de la France, de l’Angleterre, de la Russie elle-même, d’autant plus intéressée à défendre le Danemark, qu’en le livrant à l’Allemagne, elle perdrait le droit de se servir de l’intégrité de la monarchie danoise comme d’une arme pour s’opposer à cet autre mouvement du scandinavisme, qui peut compromettre sa prépondérance dans la Baltique. Que deviendra cette question du scandinavisme ? Lorsque le ministre des affaires étrangères de Copenhague dit, dans une circulaire récente, que ce mouvement n’est dangereux ni par sa force propre, ni par le prestige qu’il exerce, il se flatte peut-être. On en pourrait trouver la preuve dans la publication d’une brochure de M. le baron de Blixen, beau-frère d’un des princes de la famille royale danoise. Au demeurant, c’est une question laissée aux décisions de l’avenir. Pour le moment, il faut bien le reconnaître, le Danemark ne pouvait laisser affaiblir l’idée de son intégrité, lorsque cette intégrité est menacée par les entreprises de l’Allemagne ; il s’arme du principe qui fait sa force, et devant lequel l’Autriche et la Prusse s’arrêteront encore sans doute, au lieu d’aller plus loin dans un conflit dont la diète de Francfort ne peut être en aucun cas le dernier arbitre.

Il est pour un autre des états Scandinaves, pour la Suède, une question qui n’a rien de diplomatique et qui n’est pas moins grave, c’est la question religieuse. De nouveaux documens viennent d’être mis au jour à Stockholm, et ils montrent à quel point les idées de tolérance ont de la peine à faire leur chemin dans le monde. Le premier de ces documens rappelle une discussion