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d’amplitude. L’électricité, ce fluide vital de notre globe, avait, par sa rupture d’équilibre, causé pour ainsi dire des vapeurs et des mouvemens nerveux au léger barreau aimanté dirigé par son influence. Cet agent mystérieux ne nous a pas sans doute encore dit tout ce qu’il peut nous apprendre sur la constitution intime du globe et sur ses changemens internes. En cela comme en bien d’autres parties du domaine des sciences, la postérité saura.

La grande théorie de Laplace sur la fluidité ignée de l’intérieur de notre globe permet de penser qu’en vertu d’un mouvement de rotation plus rapide dans les continens que dans la masse centrale, ceux-ci, au bout d’un certain temps, font le tour entier du noyau central et correspondent successivement à des points différens de ce noyau. Il doit en résulter des déplacemens, des remous du fluide intérieur, à cause de l’inégalité de forme et d’épaisseur des couches continentales. Certains bruits souterrains que l’on entend au moment des éruptions volcaniques paraissent dus à des masses rocheuses que le déplacement de la lave sous-continentale roulerait avec fracas au-dessous de la partie solide de l’écorce du globe, comme si, sous la glace inégale d’un étang gelé, les mouvemens de l’eau déplaçaient des glaçons qui heurteraient par en bas les inégalités de la croûte congelée. Au reste, je n’indique cette idée que comme une pierre d’attente pour une théorie détaillée qui reste à construire, et qui ne pourra être construite qu’après qu’on aura recueilli tous les faits que l’observation peut fournir à la théorie.

On a objecté à la fluidité intérieure de notre globe cette idée, que si la terre était encore presque tout entière en fusion, les marées produites par la lune et par le soleil sur ce liquide immense devraient continuellement en changer la forme et disloquer perpétuellement cette croûte peu épaisse qui forme nos continens, et qui n’a pas soixante kilomètres d’épaisseur, d’après la loi de progression de la température, qui nous indique qu’à cette profondeur, et à la température qui y règne, toutes les roches non cristallisées qui se sont formées hors de l’influence des agens météorologiques seraient dans un état complet de fusion. Je m’étonne que Laplace n’ait pas prévu cette objection, qu’Ampère et plusieurs savans faisaient et font encore journellement à la belle théorie de ce grand homme. Je vais montrer péremptoirement qu’elle ne tient pas contre un examen approfondi. Calculez de combien la lune soulèverait la surface de notre globe, si elle restait constamment au-dessus d’un même point ; vous trouvez que son action est au-dessous d’un neuf-millionième de la pesanteur qui retient les matériaux de notre globe. Elle ne soulèverait donc pas la portion de la surface qui serait au-dessous d’elle d’un neuf-millionième de la distance du centre de la terre à sa surface,