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des whigs leurs héritiers, et dont Bryant fit bientôt le journal le plus important du parti démocratique. Bryant suivit dans l’Evening-Post l’exemple donné par M. Walsh dans la Gazette nationale; il fit une place considérable à la littérature, il s’associa même en 1832 le littérateur Leggett, afin de pouvoir se consacrer exclusivement à la politique. Depuis trente ans en effet, Bryant a pris une part très active à toutes les luttes politiques, et il a exercé une incontestable influence sur l’opinion. Épousant avec ardeur les opinions démocratiques dans ce qu’elles avaient de plus absolu, il a été l’ennemi acharné de la banque des États-Unis, l’adversaire du pouvoir central et de ses prétentions à diriger lui-même des entreprises d’utilité publique, et le défenseur de la liberté illimitée des échanges. Seulement la vigueur et la droiture de son esprit l’ont toujours élevé au-dessus des passions et des préjugés de son parti, et il n’a cessé de réclamer, même pour ses adversaires, la plus entière liberté de discussion. Il a donc été conduit à combattre bien souvent ce qui est et ce qui demeurera aux États-Unis le fléau de la liberté, à savoir la tyrannie de la majorité, qui ne se contente pas de faire prévaloir sa volonté, mais qui veut trop souvent étouffer la voix du parti opposé. Il est demeuré pur de toutes les intrigues où sont trop souvent entrés des publicistes de son opinion, et avec un talent hors ligne qui aurait justifié toutes les prétentions, avec une influence que personne ne conteste, il n’a jamais voulu être qu’un simple écrivain. Le style de Bryant est clair, vif, animé; mais c’est à une évidente sincérité et à un accent de profonde conviction que ses articles doivent surtout leur succès et leur autorité.

Pour clore la liste des écrivains qui se sont fait un nom dans la presse américaine, il nous faut mentionner encore Nathaniel P. Willis et Mme David Lee Child. Tous deux sont avant tout des littérateurs, mais c’est à la presse quotidienne qu’ils ont dû leur succès. N.-P. Willis, né en 1807, à Portland, dans le Massachusetts, n’avait écrit encore que dans les magazines lorsqu’il entreprit un voyage en Europe. Il parcourut successivement la France, l’Italie, la Grèce, l’Asie-Mineure, et revint en Angleterre, où il séjourna deux ans. Pendant cette longue absence, il adressa au Miroir de New-York, sous le titre de Coups de Crayon sur la route (Pencillings by the way), une série de lettres ou d’impressions de voyage qui eurent le plus grand succès. Réunies en volumes, ces lettres ont été goûtées en Angleterre presque autant qu’aux États-Unis, et ont eu plusieurs éditions. M. Willis est aujourd’hui le directeur de la Feuille du Foyer (Home Journal), journal hebdomadaire qui se publie à New-York et qui est consacré presque exclusivement à la littérature. Mme Child a débuté dans les lettres en 182Zi, sous le nom de miss Lydia Francis :