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et ses articles en firent le succès. Legaré a été souvent mis en balance, aux États-Unis, avec Edward Everett; le savoir de tous les deux était immense, et si le second avait dans le style plus de souplesse et d’éclat, le premier passait pour avoir un talent plus ferme et plus vigoureux. La Revue du Sud ne survécut point au départ de Legaré pour Bruxelles, où il fut envoyé en 1833 comme chargé d’affaires. Elle a été ressuscitée en 1842 par le révérend Whittaker, mais elle n’a point jusqu’ici jeté un vif éclat. La Revue du Massachusetts, qui se publie à Boston, l’American Register de Stryker, et les autres recueils trimestriels de la Nouvelle-Angleterre n’ont jamais pu s’élever au-dessus de la médiocrité. Une seule revue eut un moment de vogue, dû à l’attrait de la curiosité : c’est la Revue trimestrielle de Brownson, ainsi appelée du nom de son fondateur. M. Orestes Brownson, né dans le Vermont en 1802, est l’un des écrivains les plus remarquables et les plus discrédités des États-Unis. En politique, il a été tour à tour whig et démocrate; en philosophie, il a professé, puis combattu l’éclectisme; en religion, il a été successivement déiste, universaliste, unitaire, et depuis 1844 il est catholique ultramontain. On a dit malignement de lui que, si tous ses écrits et ses discours étaient recueillis et classés chronologiquement depuis Charles Elwood, le roman qui fut son début dans les lettres, jusqu’à son dernier article en faveur du catholicisme, ils formeraient l’étude psychologique la plus curieuse et la plus intéressante. Ce qu’on ne lui conteste point, c’est un grand savoir, beaucoup de subtilité et de ressources d’esprit, un talent puissant et nerveux.

C’est M. Brownson qui fit connaître aux États-Unis, vers 1830, les travaux de l’école philosophique française. Il ne jurait que par Royer-Collard, Cousin et Jouffroy, qu’il a fort attaqués depuis. S’é- tant associé de toutes ses forces à la réaction qui se produisit alors en Amérique contre la philosophie de Locke, il écrivit dans le Christian Examiner, sur la métaphysique, des articles éloquens et fort remarqués. En 1836, il publia ses Vues nouvelles sur le Christianisme, la Société et l’Église, qui signalèrent sa rupture avec les unitaires, et en 1838 il commença la Revue de Boston, qu’il rédigea presque seul, pendant cinq années, avec un talent et une originalité qui lui valurent une grande réputation. La métaphysique, la théologie et la politique étaient ses sujets de prédilection, et il y déployait une égale supériorité. A la fin de 1842, il se décida à fondre la Revue de Boston avec la Revue démocratique de New-York; mais il ne put s’entendre avec les directeurs de ce recueil, et en 1844 il ressuscita son ancienne revue, qu’il a depuis lors rédigée presque seul, et qui a naturellement reflété toutes les variations du fondateur.

Les seuls recueils trimestriels qui aient une existence assurée aux