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Parmi les principaux objets du livre Ier figure la grande question du morcellement parcellaire ; même en admettant avec un grand nombre de jurisconsultes et de praticiens que toutes les questions qui devraient être résolues par un codé rural ne sont pas parvenues à leur maturité, celle-ci pourrait dès à présent faire l’objet d’une loi spéciale, car il y en a peu de mieux connues. Les inconvéniens du morcellement parcellaire, qu’il ne faut pas confondre avec l’égalité des partages et la petite propriété, sautent aux yeux, surtout dans les dix départemens de l’angle nord-est de la France. Sur les cent vingt-six millions de parcelles qui se partagent le sol national, ces dix départemens en ont à eux seuls le cinquième. Tout le monde y sent la nécessite d’un remède légal à cet endettement indéfini, et tourne les yeux vers les états voisins de l’Allemagne rhénane, qui souffrent du même mal et cherchent à s’en guérir.

L’abolition de la vaine pâture est moins nécessaire ; on ne peut cependant contester les mauvais effets de cette promiscuité rurale et la nécessité de là faire disparaître progressivement. Le rapport rappelle à ce sujet que dans la session de 1854 le corps législatif, « n votant une loi spéciale pour la cessation du parcours et de la vaine pâture en Corse, a exprimé par l’organe du rapporteur, dans les termes les plus énergiques, le vœu que la même mesure fût appliquée à la France. On peut prendre toute sorte de précautions pour ménager la transition : en Corse, la loi n’a été mise en vigueur qu’un an après la promulgation oh peut décider qu’en France elle ne le sera que dans trois ans, on peut même autoriser les préfets à prolonger ce délai dans les communes dont les conseils municipaux le demanderont ; on peut enfin se borner, pour commencer, à abolir la vaine pâture dans les prairies naturelles, où le législateur de 1791 ne l’a conservée que provisoirement, après la récolte de la première herbe, et pendant qu’il la supprimait complètement sur les prairies artificielles. Le rapport qui proscrit la vaine pâture propose de conserver le glanage et le grappillage. Il est sans doute difficile d’abroger ces usages antiques qui ont l’air de venir au secours des indigens ; mais il serait imprudent de les accepter en principe comme réellement utiles et de les inscrire comme tels dans une loi nouvelle Le rapport paraît beaucoup plus dans le vrai quand il demande la révision de l’article 1810 du code civil sur le cheptel ; cet article, qui décharge les preneurs de toute responsabilité si le troupeau périt en entier, et qui leur fait supporter la moitié de la perte s’il ne périt qu’en partie, est purement et simplement absurde, en ce qu’il intéresse les preneurs à ce que la perte devienne totale, quand elle est partielle.

Les autres parties du code rural, notamment tout ce qui tient au régime des eaux, soulèvent à chaque pas d’innombrables difficultés. Les deux lois de 1845 et 1847 sur l’irrigation, celles plus récemment