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nus pour loi perpétuelle. Ne voulant rien céder, elle s’exposa à tout perdre.

La guerre en dut décider : elle fut poursuivie pendant quatre mois avec des vicissitudes diverses, et sans résultat décisif. Les comuneros et les cavalleros, dont les armées grossissaient et diminuaient selon l’arrivée ou le départ des contingens mobiles qui leur venaient du côté des villes ou des rangs de la noblesse, s’attaquaient et se défendaient tour à tour. Les cavalleros avaient surpris Tordesillas, enlevé aux insurgés la personne de la reine, contraint la junte fugitive de se renfermer dans Valladolid. Au mois de mars 1521, ils occupaient une ligne de châteaux qui s’étendait de Simancas à Médina de Rio-Seco par Tordesillas et Torrelobaton, et leurs garnisons, bloquant en quelque sorte Valladolid du côté de l’ouest, l’inquiétaient en faisant des sorties continuelles. Les comuneros voulurent briser cette barrière menaçante déplaces, et ils s’avancèrent contre Torrelobaton sous la conduite de Juan de Padilla, nommé leur capitaine-général. Par une éclatante revanche, après quelques jours de siège, ils prirent la ville et sa citadelle d’assaut, et les mirent à sac[1]. Ce succès même causa leur ruine.

Leur armée, chargée du pillage de Torrelobaton, se fondit en grande partie. Chacun courut mettre à couvert le butin qu’il y avait fait. Les cavalleros au contraire sentirent, après cet échec, la nécessité de se renforcer; ils réunirent leurs troupes dispersées, auxquelles se joignirent les soldats de la Navarre, envoyés par le duc de Najera, et ils résolurent d’attaquer les comuneros, que leur victoire avait affaiblis, et qui demeuraient immobiles à Torrelobaton. Le comte de Haro, fils du connétable, nommé capitaine-général de l’armée des cavalleros, après avoir concentré ses forces, était prêt à livrer une bataille décisive que Juan de Padilla lui rendit facile à gagner.

Ce vaillant, mais infortuné capitaine des comuneros comprit qu’il était trop resté à Torrelobaton, et qu’il y demeurait trop exposé. Il se décida donc à quitter cette dangereuse position, et le 21 avril au matin il en partit dans un assez bon ordre. Il se dirigea vers Toro, où il espérait être joint par les troupes de Léon, de Zamora et de Salamanque. Il plaça l’artillerie à l’avant-garde, l’infanterie, divisée en deux gros bataillons, au centre, et la cavalerie, à la tête de laquelle il resta, à l’arrière-garde. La marche ne put pas être bien rapide, et il avait douze lieues à faire pour arriver à Toro. Dès que les cavalleros surent qu’il s’était mis en mouvement, ils s’ébranlèrent aussi; ils le joignirent et l’attaquèrent dans la plaine de Villalar.

  1. Sandoval, lib. VIII, § XLV à XLVII. — Historia del Levamiento, c. VII.