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duché leur libre administration locale. La principale d’entre elles. Milan, choisissait par des élections savamment compliquées le conseil de la cité, qui nommait à son tour les magistrats chargés d’y exercer l’autorité et d’y rendre la justice.

François Ier n’avait point altéré, au début de son règne, cette forme rassurante d’administration. Comme Louis XII, il s’était appuyé sur le parti guelfe, dont le chef avait si vaillamment combattu auprès de lui dans les deux journées de Marignan, sans opprimer les gibelins compromis, qu’il avait au contraire rappelés de leur exil et remis dans leurs biens. Avec cette sage modération, et par le choix heureux du connétable de Bourbon, qu’il en avait nommé gouverneur, il avait pu conserver en 1516 contre l’empereur Maximilien le Milanais, reconquis en 1515 sur les Suisses. Après la double épreuve d’une occupation victorieuse et d’une agression repoussée, François Ier serait resté maître de la Lombardie, s’il y avait laissé le connétable de Bourbon; mais il l’en retira fort imprudemment pour mettre à sa place Odet de Foix, seigneur de Lautrec, frère de la comtesse de Châteaubriant, sa maîtresse. Tout changea sous l’administration du nouveau gouverneur. Soutenu par la favorite, qui avait le plus grand pouvoir sur François Ier, l’avide et impérieux Lautrec accabla le Milanais de ses exactions et de son oppressive autorité. Il y augmenta les taxes, y suspendit l’action trop indépendante du sénat et y remplaça le conseil élu de la cité par une assemblée dont il réduisit le nombre et dont il nomma les membres[1]. Il persécuta les gibelins, sans garder de ménagemens pour les guelfes. Le chef puissant de ce dernier parti, le maréchal J.-J. Trivulzi, qui, plus qu’un autre, avait établi et maintenu la domination française dans le Milanais, fut dénoncé à François Ier comme un mécontent sur le point de devenir un rebelle[2]. Ce grand serviteur de la France sous trois de ses rois, cet habile capitaine qui avait combattu pour eux dans un si grand nombre de batailles, malade et âgé de soixante-dix-sept ans, passa les Alpes afin de se justifier auprès de François Ier sans y parvenir. Le crédule et ingrat monarque rejeta

  1. Verri, t. II, p. 170-171-191.
  2. Dell’ Istoria intorno alle militari imprese et alla vita di Gian-Jacopo Trivulzio detto il magno, del cavaliere Carlo de Rosmini. Milano, 2 vol. in-4o, 1815, t. Ier, p. 329-530. —Verri, p. 174-175.