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mense armée. » Nous répétons les expressions d’un des défenseurs les plus convaincus de l’Alaise séquane[1], bien qu’elles nous semblent, nous sommes forcé d’en convenir, s’appliquer très peu au terrain tel que la carte nous le représente. Cependant le proconsul fait sa reconnaissance et se décide à bloquer l’armée gauloise. Il doit dès lors se saisir des positions les plus importantes qui entourent le massif, et tenter de fermer vers leur naissance les nombreux ravins qui offriraient à l’ennemi de faciles débouchés. Les points qu’il aurait dû ainsi occuper pour compléter l’investissement sont désignés aujourd’hui par les noms de Échay, Doulaize, Refranche, Coulans, Éternoz, Monmahoux, Crozet, Geraize, Sansenay, les Malcartiers, et forment les sommets d’un polygone d’environ trente kilomètres de côté ; encore plusieurs de ces points auraient-ils été tellement dominés et tellement difficiles à défendre contre toute attaque de l’ennemi extérieur, qu’il aurait fallu s’étendre davantage, pousser à l’est au-delà de Refranche et de Coulans, au sud et à l’ouest occuper le mont Poupet, By et Bartherans, ce qui nous donnerait alors un périmètre de plus de dix lieues. Nous voilà déjà bien loin des dimensions assignées par les Commentaires à la contrevallation et à la circonvallation ; mais pourquoi le proconsul aurait-il songé à construire ces lignes ? Pourquoi un blocus ? César n’est séparé de l’ennemi que par un mince ruisseau, derrière lequel le terrain s’élève en pentes au moins accessibles. Comment ne profite-t-il pas de la supériorité morale que lui donne sa victoire de la veille pour attaquer immédiatement l’ennemi, le déloger d’un premier contre-fort appelé Charfoinge, et si les défenses des Gaulois sont accumulées dans le nord et l’est du massif, comment ne cherche-t-il pas à s’emparer de toute la partie occidentale et méridionale, qui est en même temps la plus élevée ?

Ces réflexions viendront, je crois, naturellement à l’esprit de quiconque jettera les yeux sur la carte des environs d’Alaise, après s’être rendu compte de la situation relative des deux armées ; mais, encore une fois, ces premières conjectures nous éloignent si promptement et si complètement du texte des Commentaires, que marcher plus longtemps dans cette voie serait inutile et fastidieux. Renonçons donc à rechercher pour notre compte la solution du problème ; suivons les traces de ceux qui l’ont eux-mêmes posé, approfondi : nous ne pouvons trouver de guides plus ingénieux et plus habiles pour nous conduire sur un terrain qu’ils connaissent mieux que personne.

Selon M. Delacroix, César, vainqueur sur les bords de l’Ognon,

  1. M. Toubin, page 43 de sa brochure.