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l’exposition le plus large profit, exploiter comme une entreprise cette grande œuvre internationale et recueillir pour les actionnaires les élémens d’un gros dividende. De là conflit permanent entre la commission impériale, qui se préoccupait en première ligne de l’intérêt public, et l’administration de la société, qui avait surtout en vue un intérêt privé. La société, qui sentait bien que l’exposition était pour elle une épreuve solennelle et comme une bataille décisive, destinée à ruiner ou à relever son crédit, était portée à multiplier les sources de recettes. Le restaurant, la buvette, les dépôts de cannes, etc., tout lui paraissait bon pour battre monnaie, et elle comptait exercer strictement tous les droits attachés à son titre de propriété. Elle était dans son rôle, car ce n’était point par patriotisme, ni pour la plus grande gloire de l’industrie, que des actionnaires trop confians avaient consacré leurs capitaux à l’érection du vaste édifice, décoré dans l’acte social du nom de palais, qui couvre la superficie de l’ancien carré Marigny ! Mais on s’imagine combien devait être gênante cette lutte continuelle entre deux intérêts contradictoires et souvent inconciliables! Aussi le prince Napoléon se prononce-t-il, dans les termes les plus formels, contre la continuation d’un pareil système. Il demande comme une condition indispensable qu’à l’avenir le bâtiment destiné à une exposition universelle soit construit en vue de l’entreprise elle-même. Il énumère ensuite les dispositions qui lui semblent le mieux convenir pour l’aménagement intérieur d’un tel édifice, de manière à faciliter le classement méthodique des produits, à guider les études et à ménager le temps des visiteurs, h réaliser à la fois l’élégance, la commodité et la solidité. C’est un plan complet dans lequel aucun détail n’est omis. Il faut savoir gré au prince de n’avoir point dédaigné ce travail, en apparence secondaire et matériel, mais en réalité si important pour le succès d’une exposition. Le programme qu’il a tracé avec une parfaite entente et avec goût épargnera aux organisateurs de la prochaine solennité industrielle bien des mécomptes, et simplifiera la tâche de l’architecte qui sera chargé de construire l’édifice.

Nous ne devons pas oublier que, dans son rapport, le prince Napoléon traite toutes les questions au point de vue des expositions universelles, et non plus dans la prévision de simples expositions nationales, ces dernières lui paraissant être désormais sans objet. J’ai exposé les motifs qui m’engagent à penser que le système des expositions nationales pourrait encore être pratiqué en France. Dans cette hypothèse, les argumens développés par le président de la commission pour l’érection d’un édifice spécial consacré à l’exposition conserveraient toute leur force, et, alors même que les 45,000 mètres du Palais de l’Industrie suffiraient pour recevoir les produits de