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réunissait et séparait tour à tour. De là une position toute particulière faite à nos provinces du Hainaut, de la Flandre et de l’Artois. Cette distinction apparaît pour la première fois dans un tarif de 1669, relatif aux « marchandises, denrées et manufactures passant des pays restés au roi catholique en ceux qui ont été cédés à sa majesté, » document connu seulement par la mention succincte qu’en fait un tarif semblable de 1671, et dont le texte semble avoir été perdu. Les lettres-patentes portant exécution de ce second tarif montrent Louis XIV « voulant favorablement traiter les nouveaux sujets que lui ont donnés les traités des Pyrénées et d’Aix-la-Chapelle, » et modérant beaucoup, en ce qui les concerne, les droits d’entrée et de sortie ; aucune taxe n’était mise à l’importation houillère. De cette manière, à cette partie de la frontière de Champagne qui appartient aujourd’hui au département des Ardennes, on payait 96 centimes par quintal métrique de charbon, tandis que, de chaque côté, cette marchandise entrait librement, soit par la frontière du nord, ainsi que je viens de le dire, soit par la frontière de l’est, puisque celle-ci était formée par la Lorraine et l’Alsace, provinces d’étranger effectif’. Cette inégalité, que nous retrouverons de nos jours dans un ordre inverse, fut bientôt atténuée par la remise en vigueur du tarif de 1664 ; mais ce régime modéré ne dura que seize ans, puisqu’à la fin de 1688 les droits furent rétablis conformément au tarif de 1667.

Au moment où fut promulgué l’arrêt du conseil de 1692, qui régularisa la nouvelle situation, les mesures adoptées n’étaient pas applicables à cette partie du Hainaut où se trouvent les houillères de Mons, et qui, aux termes du traité de Riswick, allait être rendue par la France à l’Espagne. Les réclamations pressantes des habitans, qui auraient vu chez eux le prix du quintal métrique de houille augmenter subitement de 1 fr. 20 c, empêchèrent qu’après le partage de cette riche province le droit du tarif fût intégralement perçu sur les charbons venant de la partie espagnole du Hainaut dans la partie française et dans la Flandre française ; il fut progressivement réduit à 17 centimes. Lors de la promulgation d’un arrêt du conseil du 5 février 1761, qui avait établi sur l’importation par terre le dernier tarif de douane immédiatement antérieur à la révolution française, ce droit fut, sur des représentations venues de Bruxelles, explicitement confirmé par une décision spéciale. Cet état de choses dura en conséquence jusqu’en 1790.

Le tarif fondamental de 1692 subit également pour la houille de même origine une modification importante dans deux des provinces des cinq grosses fermes. Les maîtres de forges de la Picardie et de la Champagne se plaignirent que le droit de 1 fr. 20 c. leur fût onéreux sans avantage aucun pour les houillères françaises. La requête qu’ils adressèrent au conseil provoqua un arrêt du 19 juin