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analogues à ceux qu’on trouve dans la déclaration faite en 1812 par le tsar Alexandre. « On rendra, disait-il, aux îles leur indépendance, dont les hasards de la guerre les ont privées. » Le drapeau républicain flotta de nouveau sur les forteresses et sur les navires, les chefs des troupes anglaises ordonnèrent « de hisser le pavillon de la république et non pas le pavillon anglais, car il ne s’agissait pas d’une conquête, mais seulement d’expulser les Français. » — « Si, ajoutaient les Anglais dans toutes leurs conversations, le gouvernement national n’était pas rétabli dans tous ses droits, c’est parce que Corfou, capitale de ce gouvernement, dont la position et les forteresses étaient très importantes, était occupée par les troupes de Napoléon. » La restauration permit enfin aux Anglais de réaliser leurs bonnes intentions. La France ayant renoncé implicitement aux Iles-Ioniennes par l’article 3 du traité de Paris (30 mai 1814), le général Donzelot fut obligé d’évacuer Corfou. Le sénat, constitué sous le protectorat russe et conservé par les représentans de l’empereur des Français, crut que la chute de Napoléon devait rendre son indépendance à la république des Sept-Iles. Une guerre faite au nom des nationalités opprimées lui paraissait une occasion favorable de revendiquer les droits des Ioniens. « L’Angleterre, disait-il dans un acte du 9/21 mai 1814, a attaqué et occupé quelques-unes des îles ; mais, quelle qu’ait été l’influence accidentelle des événemens, le sénat n’a jamais cessé de regarder ces différentes occupations de territoire comme purement militaires, commandées par les circonstances, et ne différant à aucun égard des mesures provisoires prises simultanément dans les autres parties de l’Europe. Le sénat fut toujours fermement persuadé que, la guerre une fois terminée, son territoire serait, de même que celui des autres nations, évacué et rendu. »

Les Ioniens, après avoir envoyé ce manifeste au comte Capodistrias, plénipotentiaire russe au congrès de Vienne, attendirent avec un calme beaucoup trop grand les effets de la bienveillance du tsar. La guerre de 1812 avait profondément modifié les idées d’Alexandre. Après une lutte formidable qui avait épuisé les forces de son empire, il ne songeait plus à démembrer la Turquie, ni à soulever les Grecs. Aussi n’avait-il plus que de l’indifférence pour la cause des Ioniens. Capodistrias essaya, dans sa réponse, de dissimuler autant que possible la froideur de son maître. « L’empereur de Russie, disait-il, a couronné toutes ses faveurs en me permettant de remplir vos souhaits et aussi en même temps d’agir au congrès des alliés comme l’organe de la perpétuelle bienveillance de sa majesté envers notre patrie. Notre patrie a réclamé de la justice de ce monarque le rétablissement de son existence politique, dont elle a été privée par des événemens étrangers au pays. Le traité de Paris, que je me hâte