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ni le courage de réprimer par la force, Férokhsire eut maintes fois recours aux Mahrattes. Ceux-ci obtinrent du sultan le droit de lever sans obstacle, dans les pays conquis ou occupés par eux, des tributs et des impôts de toute sorte. Lorsque Férokhsire périt assassiné en 1719, — et ce fut le sort de presque tous les empereurs de sa race, — des armées mahrattes se trouvaient à Dehli; Balla-Dji Viçwanâth y était aussi de sa personne, toujours occupé des intérêts de sa nation, dont il dirigeait les affaires avec une habileté infatigable. Mêlé à des événemens d’une haute importance, ce peshwa avait déployé la plus grande activité dans ses voyages, dans ses campagnes et dans ses travaux diplomatiques. Vers 1720, se sentant malade, il demanda la permission de se retirer au sein de sa famille, à Sassour; mais il ne tarda pas à mourir[1], après avoir exercé à côté du râdja Sahou le pouvoir suprême durant six années. Son fils aîné, Badji-Rao, lui succéda sans difficulté. Habitué à se laisser gouverner, le faible Sahou, souverain nominal de la confédération mahratte, installa Badji-Rao dans ses fonctions, et lui remit de sa propre main, avec la ceinture d’or, le sceau de moukh-pardhân ou premier ministre. Ainsi se trouvait solennellement instituée l’hérédité du titre de premier ministre; à côté de la famille royale régnait une autre dynastie, celle des maires du palais, — car le mot indien moukh-pardhân et l’expression persane peshwa, qui lui correspond, signifient l’un et l’autre celui qui dirige, qui exerce l’autorité et le commandement. Le fils de Balla-Dji montra bientôt que l’esprit entreprenant et le génie ambitieux de son père revivaient en lui. De nouvelles expéditions furent résolues; le jeune peshwa avait à cœur de soumettre dans son entier la grande province de Malwa, si souvent envahie, et aussi de tenter une invasion dans celle de Gouzerate. Mohammed-Shah de Delhi venait de retirer le gouvernement de la partie du Malwa qui lui obéissait encore à un lieutenant du fameux Nizam-oul-Moulouk pour le donner au brahmane Guirdhar-Bahadour, décoré du titre de râdja. Ce brahmane roi, qui percevait les impôts au nom d’un sultan mogol, fut battu par les Mahrattes. A leur tour, les chefs musulmans, retranchés dans la ville de Sarangpour, sur les bords du Kali-Sinde, se virent contraints de payer un tribut qui devint annuel : la conquête du Malwa pouvait être considérée comme accomplie.

Molhar avait pris une part active à cette expédition à la suite de Kaddam-Bhandya, son chef de clan. Lors de l’invasion du Gouzerate, qui eut lieu immédiatement après cette première campagne, il se distingua de nouveau par son ardeur guerrière et par la rapidité de ses mouvemens. C’était comme auxiliaires des lieutenans de Nizam--

  1. En octobre 1721.