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phénomènes lumineux, l’analyse mathématique en déduisit une foule de conséquences très remarquables, et jusqu’à présent l’observation est toujours venue les confirmer. Un certain nombre de ces déductions ont un caractère étrange et tout à fait inattendu : l’on peut affirmer hardiment que l’expérience seule n’eût jamais pu les faire découvrir. Comment, par exemple, aurait-on deviné qu’en pénétrant sous un angle particulier dans des cristaux, un rayon lumineux peut en ressortir, non plus rectiligne, mais épanoui sous la forme d’un cône lumineux, composé d’une infinité de rayons? C’est pourtant ce qu’en Angleterre Hamilton avait déduit de l’analyse, ce que Lloyd eut le mérite de vérifier à l’aide d’un appareil optique de son invention. Ainsi l’observation et la théorie se corroborent mutuellement. Combien d’autres exemples ne pourrait-on pas citer pour montrer les bénéfices de cette alliance féconde ! Je n’en rappellerai qu’un encore : l’ancienne théorie de l’émission exigeait que la lumière eût une vitesse de propagation plus considérable dans l’eau que dans l’air ; la théorie nouvelle arrive à une conclusion tout opposée. Arago eut l’idée de les mettre à l’épreuve, en comparant directement ces vitesses : sous sa direction, un ingénieux physicien, M. Foucault, parvint à réaliser cette expérience décisive, dont les résultats donnèrent aux idées nouvelles une éclatante sanction.

En même temps que la théorie des ondulations se fortifiait par de nombreuses découvertes, il s’opérait entre les diverses parties de la physique un travail de rapprochement et de comparaison qui est, à vrai dire, le caractère distinctif du mouvement scientifique moderne : à mesure qu’on pénétra plus avant dans l’étude de la lumière, de la chaleur, de l’électricité, du magnétisme, on découvrit entre ces divers phénomènes des liens de plus en plus intimes. Ampère, dont on ne saurait se lasser de louer l’admirable pénétration, obtint, avec de simples fils de cuivre, convenablement enroulés et traversés par un courant voltaïque, tous les phénomènes d’attraction et de répulsion qu’on observe avec les aimans ordinaires. De son côté, le physicien danois Œrsted découvrit l’action directrice des courans électriques sur une aiguille aimantée. L’électricité et le magnétisme se trouvèrent ainsi rattachés : l’électricité et le calorique le furent également, quand Seebach, en Allemagne, eut fait voir qu’avec la chaleur seule et sans le secours d’aucune action chimique, on peut donner naissance à des courans. Enfin les beaux travaux de Melloni révélèrent, entre les lois de la propagation de la lumière et celles qui règlent le mouvement de la chaleur, une identité surprenante, depuis longtemps soupçonnée, mais dont personne avant lui n’avait donné des preuves aussi frappantes.