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HISTORIENS MODERNES
DE LA FRANCE

AUGUSTIN THIERRY
SA VIE ET SES ŒUVRES



Personne n’a jamais approché sans un profond sentiment de respect l’éminent historien que la mort nous a enlevé il y a deux ans. On arrivait avec un pieux recueillement devant son lit de douleur, croyant trouver un mourant ; mais l’ardeur et l’enthousiasme, qui semblaient la seule vie de ce corps inanimé, vous faisaient oublier bientôt quel était l’homme qui vous parlait, et l’on s’étonnait à peine qu’une destinée semblable à celle d’Homère et de Milton eût été réservée à celui qui avait su faire de l’histoire une épopée presque aussi vivante que les vieilles légendes de la Grèce. Une auréole poétique s’était attachée à cette grande renommée, achetée au prix d’un si long martyre, et il semblait que le jugement de la postérité eût commencé pour M. Augustin Thierry le jour où ses yeux s’étaient fermés à la lumière. Cette gloire si incontestée n’avait guère soulevé la discussion, et le public l’avait prise pour ainsi dire sous sa protection. Aujourd’hui cependant, après les éloquentes et ingénieuses appréciations qui n’ont manqué à aucun des écrits du grand historien[1], il y a une triste opportunité à embrasser l’ensemble de cette féconde et laborieuse carrière qu’a terminée la mort, à essayer,

  1. Les lecteurs de la Revue n’ont pas oublié le remarquable travail publié par M. Magnin à l’occasion des Récits mérovingiens, dans la livraison du 1er mai 1841.