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été adoptée la très louable mesure dont il s’agit, et ce qui pourrait faire présumer qu’on y a vu plutôt un moyen de remplacer à l’aide du papier le numéraire qui faisait défaut, c’est que l’administration du crédit foncier obtenait en même temps l’autorisation de créer un service de comptes courans approprié au rôle d’une banque ordinaire, soumise aux chances de gain et de perte, plutôt qu’au caractère d’une société de crédit foncier entendue dans le sens rigoureux que la précédente, mesure semblait indiquer. Il faut se hâter de dire qu’au point de vue pratique la double facilité concédée n’a présenté aucune contradiction et aucun danger. Le service des comptes courans, dont la société peut placer avec un avantage d’intérêt les 4/5es au trésor, lui a permis, avec le dernier cinquième, de faire des avances sur les titres mêmes qu’elle remettait à ses emprunteurs ; or ces titres, placés par ses soins et grâce aux relations qu’elle peut si aisément nouer avec les receveurs des finances dans les départemens, ont été pour la plupart du temps transformés en numéraire dans des conditions plus avantageuses que les autres valeurs négociées à la Bourse. On peut donc dire avec raison que les emprunteurs ont obtenu des prêts en argent, en ajoutant toutefois que, par suite des différences entre la valeur nominale du titre et le prix de la négociation, l’intérêt des sommes réellement empruntées s’est trouvé sensiblement accru.

Le rapport présenté à l’assemblée du 28 avril 1858 donne sur tous ces points les détails les plus précis. L’ensemble des prêts réalisés s’élève à cette date à 83 millions et demi, sur lesquels 8 ont été remboursés par anticipation : 8 millions seulement avaient été prêtés en 1857 ; mais tandis que dans le premier semestre la société n’avait pas réalisé 2 millions de prêts, dans le second au contraire, et avec la faculté de délivrer des obligations au lieu de numéraire, on avait prêté plus de 6 millions. Le nouveau gouverneur du crédit foncier, appliquant habilement les mesures proposées par M. de Germiny, ajoutait que dans le premier trimestre de l’année courante plus de 13 millions de prêts étaient à l’état d’acte conditionnel, d’autorisation ou d’instruction, et il en concluait que la faculté de prêter en titres d’obligations, inattaquable en principe, était excellente en fait. Et toutefois les tableaux mêmes que l’administration se faisait un devoir de distribuer pour éclairer le public établissaient que les conditions d’emprunt se trouvaient grandement modifiées. Ainsi, en vendant, soit par l’intermédiaire du crédit foncier lui-même, soit à la Bourse, les obligations qui lui étaient remises pour le prix intégral de 500 francs, l’emprunteur, qui en retirait en moyenne 430 fr. par exemple, empruntait en réalité à 6,71 pour 100 ; mais dans ce chiffre l’amortissement du capital se trouvait compris, et dans la période