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se brouillèrent avec eux, et après une vaine résistance, durent s’enfuir, livrant le poste à leurs ennemis, qui le détruisirent. Un successeur de Brüe le rebâtit un peu plus bas, au lieu de Makhana, en lui conservant le même nom de Saint-Joseph. Rappelé en 1714 à la tête des affaires de la compagnie du Sénégal, Brüe acheva l’entreprise, et pour se rapprocher davantage du territoire à exploiter, il construisit un troisième fort, qu’il nomma Saint-Pierre, au voisinage de la Falêmé, qui baigne le Bambouk. Il avait envoyé pour explorer le pays un habile agent, Compagnon, esprit ardent et aventureux, fertile en expédiens, qui pendant plus d’une année parcourut le Bambouk dans tous les sens, et fournit sur cette vaste et riche province les plus précieuses informations. Entre tous les noms mêlés aux annales du Sénégal, celui de Compagnon est un de ceux qui méritent le plus de survivre avec honneur, car ce fut la loyauté de ses rapports avec les indigènes qui permit à Brüe d’ériger le fort de Saint-Pierre, à l’abri duquel s’opérèrent des échanges pendant plusieurs années. Les successeurs de Brüe, en héritant de son pouvoir, n’héritèrent pas tous de sa politique : peu d’entre eux surent appuyer leurs spéculations sur le concours volontaire des noirs. L’un d’eux, Aussenac, a rattaché son nom aux recherches les plus précises qui aient été faites sur l’or de Bambouk dans le siècle dernier : en 1756, il se transporta lui-même au cœur des régions aurifères, et fit passer à Paris des échantillons de minerais qui furent trouvés très riches. Aussi la compagnie des Indes, à laquelle appartenait alors le commerce de la côte occidentale d’Afrique, faisait-elle des préparatifs et des sacrifices pour en tirer parti, lorsque les Anglais s’emparèrent de l’île Saint-Louis en 1758. À leur tour, les nouveaux maîtres, cédant à la tentation, envoyèrent l’année suivante à Galam, pour pénétrer aussi avant que possible, un agent qui fut atteint des fièvres du pays et succomba. Cet accident découragea les Anglais, si bien que, pendant leur occupation de vingt ans, ils cessèrent de rien entreprendre dans le haut pays, et laissèrent tomber en ruines tous les établissemens français, que les nouveaux directeurs, au temps de la révolution et de l’empire, eurent l’intention de relever sans en avoir les moyens ni les loisirs.

En 1824, le lieutenant de vaisseau Grout de Beaufort, en 1825 et 1829, le commis de marine Duranton, reçurent l’ordre de recommencer l’exploration des mines d’or du Bambouk. On a vu par quels incidens romanesques ce dernier avait été entraîné dans un autre courant d’aventures. Quant au premier, il mourut en 1825 au milieu de ses recherches. En 1843, MM. Huart et Raffenel, l’un pharmacien à Saint-Louis, l’autre aide-commissaire de la marine, à la tête d’une petite caravane, résolurent d’éclairer à tout prix ce mystère irritant. Partis de Bakel le 28 novembre de cette année, ils