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jours. Auprès du vieux peshwa, qui combattait au premier rang, Madhou-Rao, son neveu, — on le nommait le jeune peshwa, — faisait aussi des prodiges de valeur[1]. Sans rancune contre l’oncle ambitieux qui le dépouillait et exerçait sur lui une surveillance jalouse, il l’aidait de son bras et de ses conseils. Enfin les Mogols prirent la fuite, laissant sur le champ de bataille plus de dix mille morts; la hardiesse du vieux Holkar et l’énergie des cavaliers mahrattes avaient sauvé leur pays d’une destruction complète.

La confédération se sentait assez forte pour reprendre l’offensive et tourner de nouveau ses regards du côté de Dehli. L’année suivante, Ragounâth voulut envoyer une expédition dans l’Hindostan. Holkar devait, selon son usage, commander le premier corps d’armée; mais la mort l’enleva à l’âge de soixante-huit ans. Durant près d’un demi-siècle, ce vaillant soldat avait pris une part active aux entreprises guerrières qui plaçaient les Mahrattes à la tête des nations indiennes. Parmi les chefs de la confédération, aucun ne le surpassait en talens militaires, et il s’élevait lui-même au-dessus de tous ses égaux par la générosité et la franchise de son caractère. Il représentait bien cette première période de gloire et d’élan enthousiaste qui marque le réveil d’un grand peuple. Devenu maître et souverain d’un territoire considérable, il sut administrer ses états de telle sorte qu’il trouva dans les princes ses tributaires des partisans et des amis dévoués. Molhar-Rao laissait à ses descendans une véritable principauté, composée d’un grand nombre de fiefs conquis l’épée à la main, et dont les peshwas lui avaient accordé l’investiture. Son fils unique, Koundi-Rao, ayant été tué quelque temps avant la bataille de Paniput, les possessions et les titres du fondateur de la famille Holkar passèrent au petit-fils de ce dernier : il se nommait Malli-Rao. Très jeune encore et faible d’intelligence, Malli-Rao se montra tout à fait incapable de supporter le poids des affaires. H vivait dans une complète inaction, se livrant à des espiègleries d’enfant qui allaient quelquefois jusqu’à la scélératesse. Sa mère, Alya-Bhaïe, femme renommée pour sa vertu et sa piété, s’effrayait de le voir tourner de plus en plus à l’idiotisme et à l’imbécillité. Elle priait et répandait d’abondantes aumônes entre les mains des brahmanes, espérant ainsi fléchir le ciel et obtenir de lui qu’il délivrât son fils du mauvais esprit qui l’obsédait.

  1. L’histoire de l’administration ferme et intelligente de Madhou-Rao, lorsqu’il eut triomphé par la force de l’usurpation de son oncle, ainsi que le récit de la rivalité de ces deux peshwas, forme l’un des plus piquans chapitres des annales de l’empire mahratte; mais il n’entre point dans le plan de ce travail de raconter ces incidens multipliés et difficiles à suivre. Nous ne pouvons que les mentionner lorsqu’ils se rapportent à l’histoire des deux familles qui nous occupent, celle de Holkar et celle de Sindyah.