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nomènes physiologiques, de même qu’il y a deux parties dans le système nerveux. On peut rechercher les causes de la force vitale ou bien les manifestations de cette force, comme on peut étudier le cerveau, siège physique de la pensée, ou les nerfs, qui conduisent les sensations et les volontés. La partie philosophique est très obscure, et il faut ici, comme toujours, connaître la partie réelle et positive avant de raisonner sur le reste. C’est de la réalité et de l’expérience que nous voulons parler aujourd’hui. Il suffira d’exposer les derniers progrès de la physiologie dans cette voie, et en particulier les travaux récens d’un grand physiologiste, digne successeur de M. Magendie, M. Claude Bernard. Le système nerveux dans ses usages divers, l’action de certaines substances sur ce système, l’analogie de l’agent nerveux avec l’électricité, ont été l’objet d’études spéciales et curieuses depuis quelques années. On s’attachera surtout à ces études sans insister sur les problèmes les plus connus du système nerveux, et qui tiennent aux parties les plus élémentaires de la science. Et pourtant, qui donc connaît d’une manière complète les élémens même de la physiologie?


I.

Les anciens anatomistes n’ignoraient pas seulement les usages du système nerveux, ils n’en connaissaient pas l’existence. Ils confondaient les nerfs avec ces cordes blanches et tendineuses qui unissent les muscles et les os sous le nom de ligamens ou de tendons. Dans le langage vulgaire, la même confusion subsiste, et il n’est pas rare de voir des gens se plaindre de ne pouvoir marcher, parce que leur nerf, disent-ils, est distendu ou durci. Hippocrate eût peut-être parlé ainsi, mais il n’est pas certain qu’Aristote ne fût pas un peu plus habile, car il a décrit avec soin le nerf optique de la taupe, ce qui semble au premier abord un choix singulier. D’ailleurs il nie tout rapport entre le cerveau et la sensibilité. Hérophile, qui, selon Galien, doit être considéré comme le plus grand anatomiste de l’antiquité, confondait encore les nerfs avec les tendons, mais il leur attribuait un certain rôle dans les sensations et même dans les mouvemens volontaires. C’étaient là seulement des vues intelligentes, mais nullement des propositions démontrées, car plus tard Celse, Asclépiade et Arétée ne distinguaient pas encore les nerfs des tendons, et ce n’est guère qu’avec Galien qu’on arrive à une connaissance, sinon plus raisonnable, du moins plus raisonnée, du système nerveux. Si la partie anatomique même a fait de grands progrès depuis les descriptions que donne Galien, on peut dire, je crois, que la partie physiologique ne s’est guère perfectionnée jusqu’à la