Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 19.djvu/1001

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le trône de France, lorsque d’autres dynasties florissaient, lorsque dominait une autre forme de gouvernement ; pourquoi donc ne pourrais-je pas dire aujourd’hui que l’Angleterre a trouvé dans l’empereur des Français un fidèle allié, éprouvé dans un moment de crise, et qui attache, je le crois, une grande valeur politique à l’alliance des deux pays ? Je ne puis penser qu’un prince si sagace soit à la veille de troubler la paix du monde… Tant que nous n’aurons rien appris de plus que ce que nous savons, je n’abandonnerai pas l’espoir de voir s’évanouir l’agitation créée dans les esprits par l’état des relations de la France avec TAutriche, et je persisterai dans la pensée que la fin de cet état de choses sera non un conflit entre deux puissances militaires qui ne sauraient faire par la guerre aucun bien à l’Italie, mais plutôt une entente entre ces deux grandes puissances afin de concerter des mesures qui améliorent la condition de la péninsule, et fassent disparaître ces causes de guerre qui renaîtraient périodiquement, si la condition de l’Italie demeurait la même. »

Ferme adhésion aux traités existans, mais attachement non moins constant à l’alliance française, voilà les deux premiers faits qu’il y ait à relever pour nous dans les débats de cette grave séance du parlement anglais : nous arrivons aux considérations qui y ont été présentées sur l’état de l’Italie. Tous les grands orateurs que nous venons de nommer ont parlé des souffrances de l’Italie et de la malheureuse condition où la retiennent ses mauvais gouvernemens avec les sentimens et dans le langage qui conviennent aux hommes d’état d’un pays libre. Ils n’ont renié aucune de leurs convictions, désavoué aucune de leurs anciennes sympathies ; mais ils se sont tous réunis dans cette opinion que nous exprimons nous-mêmes depuis plusieurs mois : c’est qu’il n’est pas possible à un peuple d’attendre d’un concours étranger son affranchissement national et la conquête de sa liberté. Ils ont parlé du Piémont, de sa constitution actuelle, de son roi courageux et de son habile ministre avec l’intérêt sincère que mérite à ce petit pays et à son gouvernement la sage, libérale et ferme conduite qu’il a su tenir depuis dix ans. « Le Piémont, a dit lord Derby, est le seul point lumineux au milieu des tristes ténèbres de l’Italie, a bright spot amid the surrounding gloom ; » mais tous ils ont exprimé la crainte que le Piémont ne compromît les résultats heureux et glorieux de ces dix années, si, par ambition et par impatience, il allait jouer ses libertés contre les chances d’une guerre intempestive. Tous enfin, et en cela ils n’ont fait que reprendre le programme diplomatique légal tracé en 1856 par le Piémont au congrès de Paris, ils se sont accordés à représenter comme nécessaire et urgente la réforme des gouvernemens de l’Italie centrale. Les ministres, lord Derby et M. Disraeli, ont pu annoncer à cet égard la direction déjà prise par la diplomatie anglaise. Les explications de M. Disraeli sur ce côté pratique des questions entamées ont été plus précises encore que celles du premier ministre. Le gouvernement anglais s’est adressé aux cabinets de Paris et de Vienne, et après leur avoir communiqué ses sentimens sur le respect dû aux traités et sur le maintien de la paix, il les a engagés à se mettre d’accord pour faire cesser les causes qui perpétuent l’occupation des États-Romains par leurs troupes. Tout le monde reconnaît en Angleterre que la présence de régimens autrichiens et français dans les états du pape est une cause de conflits entre