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Mais nous attachons peut-être trop dïmportance à un écrit auquel le discours de l’empereur et les débats du parlement britannique semblent avoir enlevé toute signification dangereuse. D’accord avec ces grandes autorités, il est permis désormais de croire que l’opinion et les gouvernemens adopteront le système pacifique. La France alors, obtenant dans les états pontificaux d’utiles réformes, pourrait renoncer à une occupation militaire pénible et compromettante et exiger l’évacuation des Légations par les troupes autrichiennes. Il y aurait lieu également, suivant cet ordre d’efforts pacifiques, de travailler au règlement du droit d’intervention dans les affaires des états italiens. Il y aurait à profiter, à ce point de vue, de la suggestion de lord John Russell, et à décider, dans une conférence réunie non pour dépouiller personne de ses droits, mais pour protéger ceux de tous, qu’en Italie pas plus qu’en Serbie et dans les provinces danubiennes, aucune puissance ne serait autorisée à intervenir isolément et sans concert préalable avec les grands états de l’Europe. L’on rendrait ainsi impossible le retour de ce système d’intervention, si funeste à l’Italie, que l’Autriche s’était arrogé depuis 1815. Ces principes posés, le temps démontrerait d’une façon victorieuse, nous l’espérons, que l’Italie peut se gouverner elle-même, et que ses petits états sont perfectibles. L’Autriche cependant serait refoulée dans ses limites légitimes ; sans doute, sous le poids des haines que lui attire sa domination en Lombardie et des charges militaires et financières qu’elle lui impose, elle ne tarderait pas à revenir à ces projets de retraite qu’elle conçut un instant en 1848, et que ne cessent de lui recommander les hommes d’état de l’Europe qui portent le plus d’intérêt au maintien de sa puissance légitime. Ainsi naturellement, sans violer le droit écrit, sans déchaîner d’incalculables calamités sur l’Europe et particulièrement sur la malheureuse Italie, livrée en proie aux armes étrangères, l’on arriverait à l’affranchissement durable du sol italien. Certes nous ne méconnaissons ni les difficultés ni les lenteurs attachées à l’accomplissement de ce système ; mais, pour être lent, le succès n’en serait que plus sûr. Au surplus, après la lecture des écrits consacrés à la propagande des idées contraires et des débats du parlement, l’opinion parmi nous n’en comprend pas d’autre, et elle a cru lire avec raison, à notre avis, dans le discours impérial que tel est le système ferme, mais conciliant, que le gouvernement de la France a choisi. Si l’opinion a deviné juste, elle saura grand gré à l’empereur des résolutions annoncées par son discours, sans oublier les ministres qui ont dû être les interprètes de ses inspirations auprès du trône, et surtout celui qui conduit la politique extérieure de la France dans la crise que nous traversons, M. le comte Walewski.

L’on oublierait volontiers les soucis que la politique étrangère donne depuis un mois à l’esprit public, pour s’occuper des grands intérêts d’administration intérieure sur lesquels le retour des sessions législatives ramène naturellement l’attention. Un décret rendu sur un rapport de M. le ministre de l’intérieur vient de porter l’octroi de Paris jusqu’à l’enceinte fortifiée, et d’ajouter près de quatre cent mille âmes à l’administration parisienne. Cette mesure importante était depuis longtemps à l’étude. L’on avait trop hésité peut-être devant les intérêts qui avaient cherché à se soustraire aux rede-