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supérieure pourrait alors agir d’office et faire exécuter l’amodiation malgré le conseil. C’est une question que la vente des biens peut faire naître comme la mise en culture, car, d’après la loi organique, c’est au conseil municipal qu’il appartient de demander la vente de ces biens ; à lui seul également est dévolu le droit d’en régler l’administration et le mode de jouissance. Il importe beaucoup de se rendre compte du partage d’attributions qui a été tracé par la loi du 18 juillet 1837. Le conseil municipal est soumis au contrôle de l’autorité supérieure, mais ce contrôle varie suivant l’importance et la nature plus ou moins communale des mesures proposées : le conseil municipal règle, délibère ou donne son avis. Trois catégories d’intérêts répondent, dans la loi, à ces différens actes ; le pouvoir de l’autorité municipale s’abaisse à mesure que grandissent les intérêts communaux et qu’ils se rapprochent davantage de l’intérêt général. S’agit-il d’un acte d’administration intérieure, le conseil municipal le règle par sa délibération, et alors ses résolutions, existant pleinement par elles-mêmes, n’ont besoin d’aucune ratification. Il n’y a point ici, à proprement parler, de tutelle administrative, parce qu’il s’agit de choses essentiellement domestiques, qui n’entament point le patrimoine de l’association communale. Dès lors il n’est point permis à l’autorité supérieure de croiser en cela l’autorité locale, selon l’expression de Thouret. Au contraire, s’agit-il d’actes qui engagent l’avenir, comme des ventes, c’est encore le conseil municipal qui propose, mais c’est l’autorité supérieure qui dispose. N’est-il question que de choses qui ne touchent qu’indirectement aux intérêts communaux, comme les budgets de fabriques d’église, le conseil municipal n’a plus qu’un avis à exprimer. C’est dans ces deux derniers cas seulement qu’il est en réalité sous l’empire de la tutelle administrative.

Dans son lumineux rapport sur la loi de 1837, le savant et regrettable M. Vivien résumait ainsi l’économie de la loi : « La division adoptée par le projet de loi est logique et vraie. Les conseils municipaux doivent exercer tantôt un droit entier et propre, tantôt un droit subordonné, et enfin, dans certains cas, un simple droit d’avis. Dans ce cadre viennent se placer tous les intérêts dont ils ont à s’occuper, et la première de ces catégories, quoiqu’elle se borne à peu d’objets, reconnaît et constitue au moins le pouvoir municipal. Nous hâtons de nos vœux l’instant où le progrès des lumières et l’initiation des citoyens au maniement de leurs affaires permettront d’augmenter le nombre de celles qu’on pourra remettre entièrement à leur décision. » Or, dans cette première catégorie, qui reconnaît et constitue le pouvoir municipal, et qui remet certaines affaires à la seule décision du conseil, se trouve l’amodiation