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aux écritures inspirées de Dieu, leur foi commune au Dieu sauveur, au Père, qui les a aimés, et qui les justifie par grâce, par la foi en son Fils ; au Fils, qui les a rachetés par son sacrifice expiatoire, et au Saint-Esprit, l’auteur de leur régénération et de leur sanctification, — un seul Dieu béni éternellement. » Cette rédaction, dans un style un peu embarrassé, exprime le fond commun du christianisme d’une manière suffisamment correcte, et comme elle n’interdit pas tout ce qu’elle omet, pas même de croire que les œuvres soient une condition nécessaire de la justification par la foi, elle pourrait à la rigueur être admise par un catholique, et le sentiment qui l’a dictée est louable. Mais quoiqu’on eût tort d’exclure les catholiques de propos délibéré, on ne doit pas espérer qu’aucun d’eux accède à l’alliance ; ils sauront à peine qu’elle existe. Des membres du clergé parfaitement orthodoxe ont pu consentir à se mêler à des hérétiques, à bien pis que des hérétiques, pour coopérer à des œuvres morales, entre autres à la direction de l’éducation publique. L’œuvre de l’alliance pourtant leur paraîtra toujours, et avec raison, exclusivement protestante. Bien plus, il est douteux qu’elle convienne jamais complètement à une église politiquement constituée, et celle d’Angleterre même, comme celle d’Ecosse, ne lui enverra que des membres isolés qui ne stipuleront que pour eux-mêmes. Ils viendront principalement de l’ancien parti évangélique ou du large sein de la broad church. Quelques évêques pourront voir l’institution avec bienveillance, aucun ne s’y associera. À plus forte raison, la high church, le puseyisme, tout ce qui confine à l’église romaine continuera, comme elle, à se tenir à l’écart. C’est parmi les presbytériens et dans les nombreuses variétés du dissent, c’est dans le protestantisme de l’Europe et de l’Amérique, généralement plus rapproché du christianisme synodique que de l’église épiscopale, que l’alliance trouvera le plus d’adhérens. Et comme c’est aussi là qu’avec plus de ferveur et de zèle il s’est manifesté longtemps plus de penchant à restreindre la largeur de l’esprit par l’étroitesse de la lettre, c’est là que l’alliance peut faire le plus de bien, et son existence est déjà un heureux signe des temps, dût-elle être passagère comme tant d’autres bons signes.

Mais de ce côté même, du côté des communions chrétiennes indépendantes, ou qui aimeraient à l’être, jusqu’où peut aller la conciliation ? A quelles limites s’arrêtera le ralliement dont on fait la tentative ? Nous avons vu avec quelle sollicitude on s’est mis en garde contre le vague des formules. On a craint l’invasion d’un christianisme purement nominal. Il ne faudrait pourtant pas qu’une défiance excessive parût mettre hors de l’Évangile les Milton et les Newton, et des apologistes tels que Grotius et Lardner. Déjà les sentimens de respectueuse sympathie témoignés à M. Bunsen dans