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Levant des contributions forcées sur les habitans des districts qu’il parcourait, dépouillant de leurs richesses les caravanes de marchands, saccageant les villes, Djeswant-Rao fit une pointe vers l’extrémité orientale de la province de Kandeish, soumise à Dowlat-Rao-Sindyah. Après avoir ramassé un butin considérable de ce côté et enrôlé par milliers de nouvelles recrues qu’attirait l’appât du pillage, il marcha sur Mhysir, capitale des états de Holkar du temps de la reine Alya-Bhaïe. Le prince régnant, qui résidait alors à Inodore, envoya une des brigades du chevalier Du Dernaic au-devant de Djeswant-Rao pour lui barrer le chemin ; mais celui-ci remporta un avantage signalé sur ces troupes régulières, qu’il attaqua avec la plus grande résolution. Dès lors le nom de Djeswant-Rao devint populaire dans les états de Holkar. Cédant aux suggestions du vainqueur qui les conviait à déserter leurs drapeaux, les troupes du faible Kasi-Rao abandonnèrent un prince qui ne régnait que sous le bon plaisir de Sindyah. Du Dernaic lui-même alla rejoindre avec ses brigades l’heureux Djeswant-Rao, qui était venu se poster à vingt milles de la ville d’Indore. Dès lors Kasi-Rao cessa d’être le souveraim même nominal des états de Holkar. Toutes les provinces de l’Inde centrale appartenant à cette famille reconnurent l’autorité de Djeswant-Rao, agissant au nom de l’enfant royal toujours détenu à Pounah par Dowlat-Rao-Sindyah. Les trésors amassés par la sage et prudente reine Alya-Bhaïe servirent à payer les soldats de Djeswant-Rao, qui continuait de livrer à ses troupes, toujours avides de butin, les districts que Sindyah possédait dans la province de Malwa, et qu’il écrasait sous le poids des contributions de guerre. De son côté Amir-Khan, à la tête de ses Afghans indisciplinés, rançonnait indistinctement et sans pitié les villes qui relevaient du peshwa et les districts régis par de petits princes indépendans. Cette belle province de Malwa, fractionnée en une foule de principautés toujours convoitées par le plus fort, hérissée de châteaux assiégés à chaque nouvelle guerre et aussi occupée par les trois peuples les plus belliqueux de l’Inde, les Mahrattes, les Afghans et les Radjepoutes, avait le triste privilège de se voir traversée en tous sens par les bandes qui désolaient l’Inde centrale. Paisible et florissant pendant les règnes de la vertueuse Alya-Bhaïe et du glorieux Madha-Dji, qui avaient su faire prospérer, celui-ci les états de Sindyah, celle-là les états de Holkar, le Malwa souffrait d’autant plus cruellement des dissensions de ces deux familles devenues ennemies, qui elles y possédaient l’une et l’autre leurs villes capitales, Ouddjein et Indore.