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encourageans : dès la fin de la première année, sur 2,050 enfans de quatre à dix-huit ans, 791 étaient inscrits; nous ne parlons que de l’éducation primaire et gratuite, c’est-à-dire de celle qui s’adressait aux classes nécessiteuses. Un an plus tard, ce chiffre montait à 1,399 sur 2,730 enfans. Ce n’était pas un effort isolé, une tentative sans suite, c’était la volonté la plus ferme et la plus arrêtée, comme le prouvait la généreuse persévérance à laquelle les écoles devaient de se voir toujours au nombre des premières maisons rouvertes chaque fois que l’incendie anéantissait une partie de la ville. En somme, même dans les dix années qui viennent de s’écouler, tant dans les établissemens primaires que dans les institutions non gratuites, on eût pu compter à un jour donné les quatre cinquièmes des enfans de San-Francisco, ce qui, en faisant la part des conditions particulières à cette statistique, revient à dire que tous recevaient au moins la précieuse instruction élémentaire de la lecture et de l’écriture. Peu de villes en France, même les plus fières de leur civilisation, ont le droit d’en dire autant.

Ce soin paternel de l’Américain pour l’enseignement de l’enfance tranchait d’autant plus ici qu’il était complètement exceptionnel. S’agissait-il de pourvoir aux besoins des malades, de garantir l’existence du pauvre, heureusement rare en Californie : le gouvernement revenait à son immuable principe de neutralité; les associations particulières se formaient de toutes parts, et la charité privée reprenait tous ses droits. Dès 1849, les francs-maçons, que le ridicule a un peu discrédités chez nous, organisaient à San-Francisco de véritables et efficaces centres de secours mutuels ; ensuite vinrent les old fellows, la société de la Nouvelle-Angleterre, celle des pionniers de Californie, et d’autres que j’oublie, puis les associations qui pratiquaient le bien non-seulement par l’exercice de la sobriété devenue leur mot d’ordre, mais aussi par l’appui constant que la misère trouvait en elles : c’étaient les fils de la tempérance, les cadets de la tempérance, les templiers de l’honneur, etc. Les étrangers ne restaient pas en arrière, et les Français donnaient le signal par l’institution d’une société à laquelle concourait généreusement le docteur d’Oliveira en ouvrant à ses compatriotes indigens et malades les portes de l’hôpital qu’il avait fondé. Les Allemands nous imitaient, et après quelques années les Juifs eux-mêmes suivaient notre exemple. Les œuvres touchantes de la charité féminine n’étaient pas négligées, et parmi les nombreuses fondations de bienfaisance qu’on lui doit, ceux qui ont visité San-Francisco ne peuvent avoir oublié un admirable orphelinat, où les enfans que la mort a laissés sans parens ni appui retrouvent les soins prévoyans d’une sollicitude véritablement maternelle. Parmi les résultats de