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et les plantes; la paléontologie seule put lui offrir des compensations. Combien d’êtres encore ignorés gisent dans les entrailles de la terre! Ici sont des quadrupèdes qui ont peuplé les continens du vieux monde, là des oiseaux et des insectes qui ont animé les airs ; sur un autre point sont entassés d’innombrables coquillages, témoins d’un ancien séjour de la mer dans les lieux qui sont aujourd’hui la terre ferme; nous parvenons même à distinguer les antiques habitans des eaux douces. Le spectacle de tous ces êtres est sans doute encore plus nouveau et plus imposant que celui des vastes solitudes de l’Amérique. Les voyages de d’Orbigny l’avaient préparé à l’étude de la paléontologie : les Andes, par leurs immenses déchirures, sollicitent le naturaliste à fouiller les entrailles du globe; les plaines des pampas et de la Patagonie renferment, sur une étendue de plusieurs centaines de lieues, des débris de quadrupèdes fossiles capable? d’intéresser l’homme le plus indifférent à l’histoire du globe.


I.

Longtemps le Nouveau-Monde n’a semblé qu’une source de richesses matérielles livrée à la cupidité de l’Europe. Presque toutes les recherches y furent inspirées par la soif de l’or. En 1781, un homme d’un esprit élevé, frappé des beautés de la nature américaine, entreprit de faire connaître les trésors scientifiques de la contrée qu’il habitait. Don Félix de Azara a le premier sérieusement étudié l’histoire naturelle de l’intérieur de l’Amérique méridionale. Commandant des limites espagnoles dans le Paraguay, il était à même de bien explorer cette contrée et les terres qui l’environnent. Pendant vingt ans, oublié dans les déserts, étranger aux progrès rapides des sciences naturelles, sans aucune communication avec le monde civilisé, il entreprit la description d’un pays de plus de cinq cents lieues de long et de trois cents lieues de large. Il est entré dans des détails curieux sur les peuples de l’Amérique; l’histoire des quadrupèdes et des oiseaux lui doit de grands progrès. En 1799, Alexandre de Humboldt et Bonpland commencèrent leurs voyages aux régions équinoxiales du nouveau continent. Spix et Martius, le prince de Wied-Neuwied, Auguste de Saint-Hilaire, publièrent à leur tour sur le Brésil d’importans travaux. En,1826, Alcide d’Orbigny entreprit l’exploration de l’Amérique méridionale. Il était alors âgé de vingt-trois ans. Déjà il avait fait ses preuves devant le monde savant. Fils d’un chirurgien de la marine royale qui cultivait les sciences avec distinction, il fut de bonne heure initié à l’histoire naturelle. Élevé sur le bord de la mer, à La Rochelle, il passa son