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Leurs croyances religieuses sont encore assez peu connues. Atoua chez eux, comme dans plusieurs îles plus septentrionales de l’Océanie, représente une divinité supérieure, mal définie, au-dessous de laquelle se rangent, dans une sorte de hiérarchie, des dieux secondaires et des esprits. Atoua revêt toutes les formes, mais surtout celle du lézard, et il signale sa présence par un sifflement sourd et léger, qui n’est perceptible que pour le prêtre ou tahounga. Celui-ci calme les vents, prévient les orages et surveille la stricte observance du tabou ou tapou, pratique superstitieuse familière à la plupart des peuplades océaniennes, et dont les moindres détails sont connus par nombre de relations et de récits. Les Zélandais admettent une sorte d’âme, un esprit, waidoua, distinct du corps, et, par une singulière analogie avec des croyances jadis familières à des races de l’Europe, ils prétendent que dans les demeures célestes les esprits passent le temps en combats et en festins. Ils se sont fait de la création une idée fort singulière : une de leurs légendes raconte que le ciel et la terre furent longtemps unis dans un embrassement qui ne permettait pas à la lumière de se faire place et d’éclairer le monde. Ce fut un de leurs fils, Tane-Mahuta, le père des forêts, qui dans un irrésistible effort, pressant l’un de ses pieds et l’autre de sa tête, a séparé ses parens. Le ciel et la terre en ont gémi, et les Zélandais disent dans une fiction pleine de poésie que c’est en souvenir de cette alliance, en témoignage de leurs regrets, que la terre exhale vers le ciel ses soupirs sous forme de brouillards, et que le ciel répand le matin sur son épouse les pleurs de sa rosée.

Ces sauvages ne connaissent, à part quelques rhythmes religieux, que des danses et des chants de guerre ; ils préludent à leurs combats par des cris et des contorsions qui surexcitent leur fureur. Leurs instrumens de musique consistent en une trompe marine et en diverses sortes de flûtes percées d’un petit nombre de trous; ils en tirent, en y soufflant avec les narines, des sons sourds et discordans. Cependant leur langue, dont quelques missionnaires anglais ont fait une étude assez approfondie, ne manque pas d’harmonie, et elle semble féconde en ressources oratoires, à en juger par les vives impressions que les harangues des chefs font passer dans les esprits et sur les visages des guerriers qui les entourent. On sait que le salut des Zélandais consiste, comme chez les autres Polynésiens, dans le frottement des nez. La polygamie règne dans ces îles; l’adultère est sévèrement puni, et l’on a vu que, par une contradiction étrange, les filles ont la liberté de se prostituer à qui bon leur semble jusqu’au moment du mariage. Les femmes sont moins belles et moins fortes que les hommes; ce sont elles, comme chez tous les sauvages, qui se trouvent chargées des travaux pénibles :