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château gothique, celui de Saint-Nicolas. Il serait presque aussi exact de dire qu’il est creusé au même endroit, car la fissure est si étroite, la paroi du rocher si exactement verticale, que, pour loger la petite garnison chargée de défendre le passage, on a dû lui ménager un abri dans le sein même de la montagne. Le Finstermuntz opposerait donc un obstacle sérieux au chef hardi qui voudrait aller chercher au fond du Tyrol les gages de la conquête de la Lombardie, au lieu de s’emparer successivement du pays en le parcourant dans toute sa longueur.

Dans cette marche méthodique, si l’on avait triomphé de la résistance de Vérone, on n’aurait plus à parcourir que les plaines de la Vénétie, seconde partie de la conquête, qui serait plus facile que celle du pays entre le Tessin et le Mincio. Le territoire est en effet moins coupé, les rivières sont plus facilement guéables, et d’un cours assez long pour que la défense en soit peu commode. Les villes possédées jadis par la république de Venise ont presque toutes conservé leurs murailles du moyen âge; mais, capables de résister encore à des corps de cavalerie et d’infanterie, elles devraient ouvrir leurs portes à une troupe pourvue d’artillerie. Depuis l’Adige jusqu’aux provinces illyriennes, il n’y a que Palma-Nuova et le fort d’Osopo qui puissent exiger un siège régulier. Osopo est trop petit pour entrer en considération dans la marche des armées, et Palma-Nuova, plus importante et capable de servir de base d’opération, verrait sans doute sa résistance limitée à une durée de trois semaines, si elle était livrée à ses seules forces. Il faudrait toutefois pendant cette marche exercer une exacte surveillance sur le Tyrol, et on pourrait le faire sans pénétrer dans la partie allemande, qui est la plus montagneuse et la mieux défendue. Il suffirait pour cela de couper la route du Stelvio et d’occuper fortement la vallée de l’Adige à Bolzano, au-dessus des points d’embranchement des autres routes qui pénètrent en Italie. Tout ce pays parle italien et se rapproche par ses sentimens du reste de l’Italie; la marche d’une armée jusqu’à Bolzano, au confluent de l’Adige et de l’Eisach, n’offrirait donc que des difficultés ordinaires. La ville de Trente, que l’on rencontrerait sur sa route, a été fortifiée autrefois, et des travaux y ont été entrepris dans les dernières années; mais le site est ingrat, les hauteurs qui dominent la ville de très près ne permettront jamais d’y faire une longue résistance, et aujourd’hui comme au temps des guerres de la république, elle n’offrirait qu’un médiocre appui à une armée en retraite.

Ce serait donc au passage des Alpes carniques, à l’entrée des provinces illyriennes, qu’une nouvelle lutte s’engagerait; mais ici la guerre perdrait complètement son caractère italien, et deviendrait