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c’est toujours la lutte entre la partie allemande du Danemark au sud de l’Eider et la partie danoise au nord de cette rivière frontière, et maintenant la question est de savoir si, le Holstein consulté, il devient plus facile de concilier les prétentions de l’esprit germanique et l’indépendance du Danemark, depuis si longtemps en présence. e. forcade.




THÉÂTRES.

UN BEAU MARIAGE,
comédie en cinq actes et en prose, par MM. Émile Augier et Éd. Foussier.


Lorsqu’il y a un peu plus d’un an je parlai de M. Augier devant les lecteurs de la Revue, quelques personnes trop sévères me reprochèrent mon indulgence ; je répondis que le reproche était mal fondé, et qu’il fallait dire sympathie et non indulgence. J’ai du goût, je l’avoue, pour cet aimable et judicieux esprit. Si le talent littéraire de M. Augier manque d’élévation, il a de la finesse et de la fermeté. Chez la plupart de nos jeunes auteurs dramatiques, la nature est infiniment supérieure à l’art ; M. Augier est peut-être le seul chez lequel il existe un équilibre raisonnable entre la nature et l’art. Il sait composer ses pièces, distribuer ses scènes, combiner ses effets ; tant d’autres ne savent rien de tout cela. Il sait qu’une pièce de théâtre doit avoir une exposition et un dénoûment, qu’elle doit être le développement logique d’une idée première, et que chaque scène par conséquent doit être un des termes de ce développement. Ce sont là des qualités assez peu communes, et qu’on rencontre rarement aujourd’hui. Ses pièces sont donc littérairement mieux construites et mieux composées que la plupart des pièces du théâtre contemporain. L’art chez lui est sensé comme la nature est judicieuse. Romantiques et réalistes se sont donné le mot pour le dénigrer à l’envi. Franchement ils ont tort, et je ne sais ce qu’ils lui reprochent. M. Augier a tout autant de verve brutale qu’un réaliste, et il a tout le sens commun que n’a pas un romantique. À l’exception du Demi-Monde, le théâtre réaliste n’a rien produit qui vaille le Mariage d’Olympe et les Lionnes pauvres. Quant aux romantiques, on pourrait leur recommander la modestie. La Ciguë, l’Aventurière, la Jeunesse, sans être des chefs-d’œuvre, sont des pièces fort supérieures aux productions saugrenues que vocifèrent les traînards attardés du drame historique, et aux enfantines élégies que les jeunes recrues du romantisme qualifient du nom de comédie. Résumons les qualités de M. Augier : il sait composer, il a un vif sentiment de la réalité, beaucoup d’esprit, de l’habileté et le sens commun. Je connais plus d’un de ses détracteurs qui n’a aucune de ces qualités.

Je suis donc parfaitement à mon aise pour déclarer à M. Augier que j’ai