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cette branche de navigation se développe à l’avenir plus rapidement. L’extension de nos rapports avec l’Algérie et avec le Levant, la création si longtemps ajournée des lignes de paquebots transatlantiques, et l’emploi de la vapeur pour une partie du cabotage doivent amener une augmentation prochaine de l’effectif. Ce n’est pas seulement pour les transports de la paix que la France doit posséder une flotte de paquebots; il faut songer aussi aux transports de la guerre. Notre marine à vapeur de commerce est loin de se trouver au niveau de nos besoins militaires. On devrait, à ce qu’il semble, ne reculer devant aucun moyen pour accroître son effectif. Que l’on autorise l’achat des steamers à l’étranger, que tous les matériaux employés à la construction de ces bâtimens soient admis en franchise de droits de douane dans nos ateliers et dans nos chantiers ; en un mot, que tous les obstacles provenant du fisc ou du régime de protection soient écartés. Quelques intérêts en souffriront et se plaindront; mais un intérêt supérieur, un intérêt général et national sera satisfait. Réciter, dans l’examen de cette question tout exceptionnelle et si urgente, les argumens ordinaires de la protection, jeter en travers de la création d’une marine à vapeur les articles du tarif des douanes, plaider la cause douteuse de quelques usines quand il s’agit d’un résultat aussi essentiel, ce serait vraiment voir les choses par le petit côté. Si l’on songe au rôle que la marine à vapeur doit jouer dans les luttes où l’honneur du pays peut être engagé, on comprend la nécessité de recourir immédiatement aux procédés les plus prompts pour atteindre le but politique et militaire que la prudence nous assigne.

Nous terminerons cet examen du mouvement maritime par l’indication de quelques chiffres concernant la navigation réservée. De 1847 à 1856, les transports entre la France et ses colonies ont employé en moyenne 424,000 tonneaux contre 276,000 seulement pendant la période antérieure, 1837-1846. L’augmentation est due au progrès de l’intercourse avec l’Algérie. La grande pêche, qui comprend la pêche de la morue et celle de la baleine, a employé, de 1847 à 1856, une moyenne de 110,000 tonnes contre 127,000 de 1837 à 1846. Il y a donc eu diminution. On sait que les opérations de la grande pêche sont favorisées par des primes d’armement, d’exportation ou de retour. Le montant des primes s’est élevé pendant la période à 3,637,000 francs par an pour la pêche de la morue, et à 225,000 francs pour celle de la baleine et du cachalot, soit au total 3,862,000 francs. La pêche de la morue a employé, année moyenne, 377, navires montés par 11,681 hommes d’équipage, et elle a fourni à l’exportation 16 millions et demi de kilogrammes de morue. Le gouvernement accorde les primes en vue d’entretenir une pépinière de matelots pour la marine militaire ; il désire en second lieu fournir à notre commerce extérieur un élément régulier d’échanges à l’aide de la morue, qui se place avantageusement sur les marchés de la Méditerranée. Or, si l’on rapproche les chiffres qui viennent d’être cités, il en résulte que la prime payée par le trésor représente 310 francs par matelot employé à la pêche de la morue, ou 22 centimes par kilogramme de morue exportée. Sans