Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 24.djvu/205

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

trouvé une caution pour retourner à son service ou dans son pays. Les mendians impotens furent internés dans les cités et villes où les trouva la promulgation de l’acte. Dans le cas où ces localités ne pouvaient les nourrir, ils eurent à se rendre sur d’autres points de la centurie, du canton ou du district, ou bien dans leur ville natale pour y passer toute leur vie. Toutefois aucune disposition ne pourvut à leur subsistance : l’Angleterre était alors couverte d’établissemens créés pour venir en aide aux nécessiteux ; il existait partout des hôpitaux fondés à l’honneur de Dieu et de sa glorieuse mère, pour recevoir les malades, les lépreux, les aliénés, les femmes indigentes et leurs enfans, et pour assister tous les malheureux. La religion n’exigeait pas seulement du baron mourant l’émancipation de ses esclaves, elle en obtenait aussi le legs d’une partie de ses biens aux pauvres. Malheureusement l’esclave ne pouvait être immédiatement transformé en travailleur libre sans devenir une cause d’embarras et un élément de désordre, parce que le servage tendait à abaisser les salaires de l’ouvrier indépendant aussi bien qu’à rendre la demande de travail incertaine, à quelque prix que ce fût. Dans cette période de transition, l’ouvrier était nécessairement exposé aux privations de toute sorte par la maladie, le manque d’ouvrage et les conséquences morales de l’oisiveté. Le pouvoir civil eut donc à prendre des mesures pour restreindre l’encouragement qu’une charité sans discernement et sans bornes donnait à la paresse et au vagabondage : ce fut l’objet d’un nouveau statut promulgué dans la même année 1388. Pendant le XVe siècle, dans un temps où la lutte des deux roses aurait dû multiplier le nombre des malfaiteurs, il y eut plus de sécurité pour les biens et pour les personnes qu’aux deux époques qui précédèrent et suivirent ces sanglans débats. Cette guerre détruisit la moitié de l’ancienne noblesse ; elle fondit ce qu’il en restait avec la gentry et même avec la bourgeoisie d’origine anglo-saxonne, et elle amena les races diverses à l’état d’amalgame complet que présente aujourd’hui la société anglaise. En même temps elle appela la masse du peuple à la jouissance des avantages résultant de l’abolition de la servitude.

Cependant les immenses privilèges de l’église, joints à la possession de près d’un tiers des revenus du royaume, avaient peuplé les divers ordres du clergé d’une foule d’hommes étrangers à la vocation religieuse. Tantôt les prélats s’entendaient avec les lords pour détourner à leur profit les fonds des hôpitaux, tantôt les monastères se recrutaient de misérables qui dissipaient dans la débauche les ressources léguées à la prière, à la bienfaisance et au renoncement personnel. Ailleurs de prétendus clercs commettaient impunément des vols et des meurtres à la faveur du bénéfice qui exemptait