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de l’Italie. La conduite des populations de l’Italie supérieure et de l’Italie centrale pendant la guerre et depuis la paix de Villafranca, l’attitude des hommes énergiques et modérés qui ont dirigé les états affranchis du joug autrichien ont confirmé d’une façon inespérée la sympathie et la confiance que nous inspirait le libéralisme italien. Devant le spectacle de ce qui se passe depuis quatre mois dans l’Italie centrale, il est devenu évident, non-seulement pour nous, mais pour tous, que la cause générale du libéralisme européen est engagée dans la question posée à Modène, à Florence et à Bologne. Les succès de l’Italie centrale seront nos succès, ses échecs seront nos échecs, ses revers seront nos revers. Nous ne pouvons perdre de vue, dans l’examen des solutions que l’on s’apprête à produire pour les affaires d’Italie, ni la solidarité de nos principes, ni la responsabilité que notre pays a encourue cette année en prenant, par l’organe de son gouvernement, dans la politique italienne, une initiative si résolue, qu’elle acceptait d’avance la chance de la guerre.

Animés de tels sentimens, c’est avec stupeur, nous l’avouons, que nous avons lu la brochure autrichienne. La publication de cet écrit est une singulière maladresse, car elle met à nu avec trop de sans-façon les avantages que la politique autrichienne espère tirer de la paix de Zurich. Il est impossible cependant de considérer l’auteur comme un enfant perdu qui compromet ses chefs sans leur aveu, car il est manifeste que ses informations lui viennent de bonne source. Il imprime les déclarations faites sans témoin par l’empereur François-Joseph à l’empereur Napoléon dans la salle à manger de la petite maison de Villafranca ; il sait ce qui s’est passé dans les conférences de Zurich, non-seulement les questions qui ont été posées, mais dans quel ordre et par quelle pente d’argumens on est arrivé aux arrangemens conclus ; il connaît les ressorts pratiques par lesquels on compte réaliser la partie la plus difficile de ces arrangemens ; il n’ignore point la besogne qui a été préparée à Biarritz pour le congrès futur. En vérité, un homme en apparence aussi bien renseigné que M. le chevalier Debrauz n’est pas pour faire rire. Nous passons sur la scène de Villafranca, sur la générosité dont a fait preuve l’empereur François-Joseph, qui avait encore en réserve deux cent cinquante mille hommes de ses troupes les mieux aguerries, en nous accordant la paix : c’est la première partie de la brochure ; mais nous nous arrêterons à la seconde, qui raconte les travaux de la conférence de Zurich, et trace, au point de vue autrichien, l’esquisse de l’arrangement nouveau de l’Italie. Le point le plus important de l’arrangement suivant M. le chevalier Debrauz, et il n’a pas tort, est la restauration des princes dans l’Italie centrale. Si cette stipulation, dit-il, n’était pas exécutée, il n’y aurait pas à signer à Zurich d’autre traité que celui qui a été conclu entre la France et l’Autriche. « Supprimez-la par simple hypothèse, et vous êtes aussitôt forcé de biffer du programme le projet de confédération italienne, auquel sont intimement liées les stipulations relatives à l’amnistie générale et aux réformes que les empereurs auront à demander au saint-père. Il ne reste plus rien de la convention de Villafranca, sinon la délimitation à fixer entre l’Autriche et le Piémont, qui pourrait demeurer à l’état de question ouverte, sans provoquer de nouveau la guerre entre l’Autriche et la France. L’empereur François-Joseph pourrait dire : « J’ai