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de la constitution et mettre les montagnards dans une complète déroute. Deux jours après, une autre bande de ces derniers, commandée par M. Domingo Arze, échouait également dans une tentative contre la ville de Chillan, capitale de la même province du Nubie. L’insurrection était décidément malheureuse dans la région du sud ; mais on avait à craindre que les montagnards, après avoir agi séparément, ne finissent par se réunir en un seul corps, ainsi qu’il est arrivé un peu plus tard ; on jugea prudent d’organiser dans ces contrées une division assez respectable, dont la composition et le commandement furent confiés au lieutenant-colonel José Manuel Pinto. Les soulèvemens partiels dans les provinces centrales n’avaient pas un meilleur résultat. La ville de, San-Felipe, chef-lieu de la province d’Aconcagua, s’étant révoltée le 12 février, il suffit de peu de jours pour la prendre d’assaut et lui infliger, dans la première ardeur du combat, un assez rude châtiment.

Le 28 du même mois, trois cents ouvriers, entraînés par les perturbateurs dans une lutte aussi déraisonnable qu’elle était criminelle, ensanglantèrent les rues de Valparaiso. Tenus en échec et dans la rage de l’impuissance, ils succombaient à l’horrible idée de mettre le feu à la maison de la préfecture, exposant ainsi au danger d’être dévorée par les flammes la seconde ville de la république, composée presque totalement de bâtimens construits en bois. Après deux heures de combat, l’ordre fut rétabli.

À l’impuissance de ces mouvemens, il était facile de voir que le bon sens des peuples répudiait la révolution. Cela ne suffisait pas encore pour que les révolutionnaires ouvrissent les yeux. Nous avons laissé M. Pedro Léon Gallo maître de la province d’Atacama, mais surveillé par les représentans de l’autorité. À considérer l’isolement de cette région, dont la partie habitable est séparée de Coquimbo par un vaste désert, le peu de ressources qu’on y trouverait pour la guerre, la cherté des vivres, la rareté des routes praticables et des abris, on pouvait prévoir que l’insurrection du nord périrait de consomption, si elle restait concentrée dans son foyer primitif, ou bien qu’en marchant sur Coquimbo, ainsi qu’on devait s’y attendre, elle irait au-devant d’une déroute. Les forces du gouvernement furent donc dirigées vers ce dernier point sous le commandement du lieutenant-colonel Silva Chaves, et bien que ce petit corps, composé d’environ douze cents hommes, n’eût pas l’avantage de la supériorité du nombre, il avait pour lui la puissance de la discipline : les chances favorables paraissaient être de son côté. En dépit des probabilités, un coup inattendu vint prolonger la guerre civile et suspendre ce travail de pacification, qui était déjà très avancé dans les esprits.