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possible les avances nécessaires à une exploitation convenable… Qu’on ne croie pas cependant que les capitaux engagés pour cet objet l’eussent été en pure perte, et que l’augmentation des produits n’eût pas compensé l’intérêt de la somme dépensée : des faits nombreux prouvent au contraire que, comme les propriétés rurales, les forêts produisent en raison des soins dont elles sont l’objet. Des expériences concluantes à cet égard ont été faites par M. E. Chevandier, directeur de la manufacture de glaces de Girey, qui ne se contente pas d’être un des plus grands industriels de France, mais qui est encore un chimiste de premier ordre.

M. Chevandier a commencé par déterminer la composition élémentaire des tissus ligneux et la proportion dans laquelle ces divers élémens entrent dans un hectare de forêt, suivant l’âge et les essences. Il a reconnu ainsi qu’un hectare de taillis de chênes et de hêtres, âgé de vingt ans, situé dans des conditions normales, représente 39,080 kilogrammes de carbone, 30,820 kilogrammes d’oxygène, 4,380 kilogrammes d’hydrogène, 680 kilogrammes d’azote et 1,000 kilogrammes de matières minérales, qui constituent les cendres. Puisque telles sont les substances dont le bois se compose, il est naturel de penser que toute cause qui en augmentera la quantité disponible devra être favorable à la végétation, et contribuera à hâter la croissance des arbres ; il ne reste donc qu’à se demander comment cette quantité peut être artificiellement augmentée. C’était là le sujet d’une nouvelle série d’expériences que M. Chevandier exécuta avec le même bonheur que les premières, en s’appuyant sur les données de la physiologie végétale.

Le carbone est puisé dans l’atmosphère par les feuilles, qui, après avoir décomposé l’acide carbonique qu’elle renferme, rejettent l’oxygène et s’assimilent le carbone sous l’influence de la lumière. Cet élément se trouve répandu dans l’air en assez grande abondance pour satisfaire aux exigences de la végétation la plus active. Il suffit que, par un traitement rationnel, les arbres soient mis à même de pouvoir en absorber la plus grande quantité possible. Il n’en est pas ainsi des autres principes constituans, sur la présence desquels la main de l’homme peut avoir une action plus directe. L’hydrogène et l’oxygène en effet proviennent de la décomposition de l’eau contenue dans le sol et absorbée par les racines ; cette eau charrie en outre, sous forme de sels solubles, l’azote et les substances minérales, qui entrent également dans la composition du bois. L’eau agit ainsi de deux manières : directement, en fournissant à l’arbre une partie des élémens mêmes qui le constituent ; indirectement, comme véhicule des matières solubles qui lui sont nécessaires. La privation d’eau a donc pour effet de rendre impossible une végétation